En chemin elle rencontre… (volume 3)
Titre : En chemin elle rencontre… (volume 3)
Auteurs/Illustrateurs : Nicole Abar / Eric Appéré / Aurélia Aurita / Catherine Beaunez / Claire Bouilhac / Caza / Florence Cestac / Laetitia Coryn / Virginie Greiner / Olivier Le Bellec / Étienne Lécroart / Eric Lenaerts / Valérie Mangin / Damien Marie / Damien May / Marie Moinard / Anthony Moreau / Christelle Pécout / Jeanne Puchol / Marc-Renier / Anne Rouvin / Sergio Salma / Tignous / Damien Vanders
Éditeur : Des ronds dans l’O
Date de publication : 2013
Synopsis : En France et dans le monde, les inégalités entre les femmes et les hommes perdurent. De la sphère politique au monde économique, du milieu professionnel à l’environnement scolaire, des stéréotypes, des expressions sexistes dans le langage, dans les objets, dans les tenues vestimentaires, des conséquences des violences faites aux femmes sur les enfants en passant par la violence économique dans le couple, au droit à l’éducation pour les filles bafoué, les auteurs passent au crible et dénoncent les discriminations et les derniers bastions du système patriarcal.
32,10 millions de filles dans le monde n’ont pas accès à l’éducation.
Après un premier volume consacré à la lutte contre les violences faites aux femmes, Amnesty International s’engage cette fois pour l’égalité entre les sexes. Plus d’une vingtaine d’artistes ont à nouveau été mobilisés pour ce projet qui consiste en une succession de planches et de caricatures abordant le sujet de manière plus ou moins légère. Pas de moralisation ici, juste des constats qu’on serait bien en peine de réfuter. Car si la situation des femmes en France, et plus largement en Occident, n’est certes pas comparable à celle des Afghanes ou des Yéménites, ce n’est pas pour autant que l’égalité homme-femme est atteinte, loin de là ! Une grande partie des récits présentés ici s’attardent notamment sur la reproduction (consciente ou non) de comportements sexistes dans l’éducation des enfants. « Les stéréotypes liés à la féminité ont la vie dure et les parents sont souvent les premiers à les inculquer à leurs enfants par le biais des jouets » : un phénomène parfaitement mis en lumière par Valérie Mangin et son histoire de « poupée pour faire des poupées ». Autre difficulté majeure dans le parcours scolaire des filles : les sports collectifs pour lesquels, c’est bien connu, elles ne possèdent aucune aptitude. Le récit sur le sujet a le mérite de pouvoir être utilisé en classe auprès de jeune enfant et est suivi d’un très beau texte de Nicole Abar. Vous ne la connaissez pas ? Elle fut pourtant huit fois championne de France de football…
Est également abordée l’épineuse question du sexisme dans le langage : pourquoi devoir préciser « madame » ou « mademoiselle » quand on donne systématique aux hommes du « monsieur » ? pourquoi le masculin l’emporte-il toujours sur le féminin en grammaire ? Pourquoi n’y a-t-il pas d’équivalent féminin aux mots « chef » et « pompier » et à l’inverse pas d’équivalent masculin pour « sage-femme » ou « dame-pipi » ? Loin d’être un sujet anecdotique, on comprend vite que la question du langage est au contraire primordiale. Le sexisme au travail est évidement un thème qui revient souvent du côté des auteurs qui le traitent de manière totalement différente : Virginie Greiner et Christelle Pécout optent pour l’humour en imaginant une société futuriste dans laquelle les comportements hommes/femmes ont été inversés (les hommes font du shopping pendant que leurs femmes prennent des décisions politiques) ; tandis que Marie Moinard et Anthony Moreau s’attachent à montrer à quel point les discriminations sexuelles au travail peuvent être destructrices pour les salariées. L’inégalité des salaires et le très faible pourcentage de femmes accédant aux postes de décision partout dans le monde sont évidemment des sujets également abordés par l’ouvrage dans lequel on trouve un certain nombre de données chiffrées très parlantes (sur 190 chefs d’états 9 sont des femmes, par exemple..).
Bien sûr la question des violences faites aux femmes finit par revenir sur le tapis. Le harcèlement sexuel subie par quantité de jeunes filles et de femmes est un problème longtemps resté tabou mais qu’il est aujourd’hui impossible d’occulter (n’en déplaise à ceux qui souhaiteraient pouvoir continuer à se conduire en toute impunité). « T’es bonne », « Chienne », « Salope », « Sale pute » : autant de termes fréquemment utilisés et dont il serait de bon ton d’enfin en comprendre l’impact sur le moral et l’estime de soi des femmes. L’excellente planche signée Jeanne Puchol (« L’habit de fait pas la pétasse ») montre d’ailleurs parfaitement que quelque soit la façon dont elle s’habille, une femme court le risque de se faire traiter de « salope » quand elle en montre trop ou de « cageot » quand elle n’en dévoile au contraire pas assez. Outre la violence verbale la violence psychologique, plus insidieuse, est également abordée par le biais d’un très bon récit signé Damien Marie et Marc-Renier et mettant en scène Nadia, une femme dont le mari se met à gérer tous les aspects de sa vie sous prétexte qu’il est le seul à ramener de l’argent à la maison. « Nadia existe réellement, vous la croisez tous les jours dans la rue » nous avertit l’auteur au début de la bande dessinée. La question des violences physiques s’invite également dans l’album, notamment par le biais de Tignous qui signe ici trois ou quatre caricatures choquantes car très crues et surtout très lucides (le titre de l’une d’elle est, il me semble, assez éloquent : « Les avantages du viol conjugal »)
Un album varié et bien documenté traitant d’un sujet sur lequel il est essentiel de revenir, encore et encore, pour que les choses changent enfin. A ceux qui penseraient que nous n’avons plus d’efforts à faire de ce côté là, je me permets de rappeler qu’un sondage datant de mars dernier révélait que dans notre pays 27 % des personnes interrogées estimaient que la responsabilité du violeur est atténuée lorsque sa victime porte une tenue aguichante. 27 %…
Aucun commentaire
belette2911
Lui, je le note de suite !!