Quelqu’un se souviendra de nous

Titre : Quelqu’un se souviendra de nous
Auteur/Autrice : Nadège Da Rocha
Éditeur : ActuSF
Date de publication : 2023 / 2024

Synopsis : L’ère des faux-semblants est révolue. Pandore est prête à traverser le monde pour se venger de Zeus et des dieux qui l’ont condamnée à la honte et à la culpabilité. À ses côtés, elle trouvera deux alliées inattendues, piégées comme elle par la malice de l’Olympe : Méduse et Arachné, deux monstres qui veulent prouver qu’elles sont bien plus que cela. Leur épopée vengeresse les mènera jusqu’aux Enfers, où elles comprendront que les dieux disparaissent déjà mystérieusement… Le temps leur est compté !

…

Dépoussiérer les mythes

Cela fait quelques années maintenant que des auteurs et des autrices ont pris le parti de réinterpréter des mythes grecs bien connus du grand public en interrogeant la place qu’y tiennent les femmes. C’est ce que font respectivement Natalie Haynes et Martine Desjardins avec Méduse, mais aussi Melchior Ascaride dans « Eurydice déchaînée », ou encore plus récemment Claire North et sa trilogie « Le chant des déesses » dans laquelle elle dynamite tous les codes sexistes de la mythologie en revisitant l’histoire de Pénélope d’Ithaque. C’est aussi ce que propose de faire Nadège Da Rocha dans « Quelqu’un se souviendra de nous », un roman young adult dans lequel l’autrice met en scène la quête de Pandore, la première femme restée célèbre pour ne pas avoir su refréner sa curiosité et avoir libéré sur le monde les pires maux. L’histoire se déroule après cet événement, alors que la jeune femme entreprend de mettre la main sur une arme légendaire qui lui permettrait d’exercer sa vengeance sur ceux qu’elle estime être les responsables de son calvaire : les dieux, et notamment le premier d’entre eux, Zeus. Sur sa route, Pandore va être amenée à rencontrer beaucoup d’autres femmes tout aussi malmenées qu’elle dans la mythologie, qu’il s’agisse de la Gorgone Méduse, de la princesse Ariane, sans oublier Arachné, Hélène, mais aussi les déesses Perséphone, Aphrodite, Héra… Le casting est assez conséquent et permet à l’autrice de brasser une large palette de mythes plus ou moins connus dans le but d’en décortiquer les ressorts sexistes et d’en proposer une réécriture queer plus moderne et égalitaire.

Le young adult et moi

L’intention est louable, le sujet traité passionnant, malheureusement j’ai eu beaucoup de mal à venir à bout de cette lecture. L’intrigue, d’abord, est assez simpliste et surtout menée à vitesse grand V, si bien qu’on a à peine le temps de faire connaissance avec les personnages ou de s’interroger sur les enjeux que plusieurs péripéties se sont déjà enchaînées. Ça va vite, trop vite, et ce grand tourbillon d’action ne permet hélas pas de s’immerger suffisamment dans l’univers, ni de développer des personnages convaincants. Certes, les réflexions de l’autrice sur le sort réservé à telle ou telle divinité ou mortelle pose des questions intéressantes et invite à porter un regard différent sur ces histoires que l’on connaît tous mais que l’on interroge plus vraiment. Seulement le roman est beaucoup trop basique et superficiel pour permettre cette prise de conscience et en même temps proposer une histoire véritablement divertissante. Les personnages sont très peu caractérisés, les dialogues pauvres et les ficelles narratives trop grosses pour permettre aux lecteurices de se laisser porter par le récit de cette femme vengeresse à laquelle on peine à s’attacher. C’est d’autant plus dommage que le récit comprend de bonnes idées (comme celle de la révolte des Enfers), mais celles-ci ne sont là encore exploitées que trop superficiellement. Il s’agit là d’un reproche que je suis souvent amenée à faire à propos de romans estampillés « young adult », aussi est-ce sans doute ce sous-genre qui ne me convient tout simplement pas…

Dans « Quelqu’un se souviendra de nous », Nadège Da Rocha nous propose un petit tour d’horizon des femmes bafouées dans la mythologie grecque, et offre même d’assister à leur revanche. En dépit d’une démarche et d’un sujet intéressant, le roman ne m’a malheureusement guère emballé en raison d’un manque de complexité et d’implicite qui ne permet pas de s’attacher aux personnages ni de se sentir émotionnellement impliqué par l’intrigue.