Science-Fiction

Les sentiers de Recouvrance

Titre : Les sentiers de Recouvrance
Auteur/Autrice : Emilie Querbalec
Éditeur : Albin Michel
Date de publication : 2024 (janvier)

Synopsis : 2035. Ils s’appellent Anastasia et Ayden. Ils ne se connaissent pas, mais leurs chemins seront amenés à se croiser. Anastasia a grandi dans une Espagne qui subit de plein fouet les consé-quences du réchauffement climatique. Après la mort accidentelle de son père, elle assiste, impuissante, au naufrage de sa mère. Ayden, lui, a appris à ses dépens qu’à trop jouer avec le feu on se brûle. Laissant derrière eux leurs existences brisées, chacun prend en solitaire la route de la Bretagne pour l’île de la Recouvrance où les attend l’espoir d’une vie meilleure.

Quête initiatique et curative

« Les sentiers de Recouvrance » est le quatrième roman d’Émilie Querbalec dont les deux précédentes publications (« Quitter les monts d’automne » et « Les chants de Nüying ») ont rencontré un important succès tant auprès du public que de la critique (elle a notamment été récompensée par plusieurs prix littéraires). Si le roman appartient toujours au genre de la science-fiction, il ne démarre cette fois pas dans l’espace mais respectivement en France et en Espagne. C’est en effet là que l’on fait la rencontre de deux adolescents mal dans leur peau qui, chacun pour des raisons différentes, vont faire le choix de quitter leur famille pour prendre la route. Anastasia (Nas) vit en Espagne dans un cadre magnifique où le manque d’eau commence toutefois à se faire ressentir mais dans lequel elle ne se sent plus à sa place depuis la disparition tragique de son père et la dépression de sa mère. Ayden, lui, vit en France avec sa mère mais est envoyé passer quelques temps chez son père après qu’il ait été gravement brûlé en manipulant des feux d’artifice de manière illégale. La première part vers le Nord, à destination de la Bretagne où vivrait la famille de son père, et emprunte pour se faire les sentiers de randonnée qu’elle a si souvent arpenté avec son père. Le second descend vers le Sud, loin de son père colérique, et longe la cote pour échapper à ses rêves de flammes et d’embrasement. Tous deux vont évidemment être amenés à ce croiser… Difficile d’en dire plus sur l’histoire dans la mesure où celle-ci prend, dans la seconde moitié du roman, un tournant tout à fait inattendu qu’il serait dommage de déflorer. Tout comme dans « Les chants de Nüying », le récit connaît en effet une rupture majeure à mi-parcours qui donne l’impression d’avoir affaire à un roman totalement différent. Or, si le procédé est globalement mieux maîtrisé ici que la fois précédente, où il m’avait totalement sortie de ma lecture, on peut toutefois regretter que l’autrice n’ait pas fourni dans la première partie suffisamment d’indices à même de rendre ce basculement moins abrupte.

Un futur porteur d’espoirs

Les deux moitiés ont cela dit ceci en commun qu’elles relatent le parcours initiatique de deux adolescents déboussolés par un drame et qui vont trouver leur salut grâce à plusieurs personnes bienveillantes qui vont endosser le rôle de gardiens. Nas et Ayden sont deux personnages touchants pour lesquels on éprouve vite de l’empathie tandis que les zones d’ombre régulièrement entretenues par l’autrice concernant leur histoire familiale ou les drames qu’ils ont traversé les rendent plus difficiles à déchiffrer. La thématique écologique occupe une place importante dans le roman puisque l’autrice dépeint ici un futur porche dans lequel les pénuries d’eau frappent de plein fouet le sud de l’Europe et où les incendies ravagent même les forêts au nord tandis que les océans poursuivent leur lent mais inéluctable grignotage des terres. Autant de phénomènes que nous connaissons déjà aujourd’hui mais qui se retrouvent ici considérablement amplifiés. Le roman n’a cela dit rien d’un récit post-apo dans la mesure où, ces conséquences négatives précises mises à part, il dresse le portrait d’un futur résolument optimiste. Le voyage des deux adolescents donne lieu à quantité de descriptions sur la faune et la flore rencontrés, sur la beauté des paysages traversés, et cette vision, couplée au processus de guérison des protagonistes, participe à installer une ambiance de sérénité qui perdure pendant toute la durée de la lecture. Le principal reproche que l’on peut formuler à l’encontre du roman réside finalement dans la simplicité de son intrigue qui se limite à l’évolution psychologique des personnages et guère plus. L’écriture est quant à elle très agréable et particulièrement habile dès lors qu’il est question de dépeindre toute la palette d’émotions par lesquels passent les protagonistes.

Quitter les monts d'automne

« Les sentiers de Recouvrance » est un roman intimiste et optimiste mettant en scène un futur proche dans lequel deux adolescents abîmés par la vie vont se rencontrer et amorcer, ensemble, un lent processus de guérison. Si les conséquences du réchauffement climatiques occupent une place centrale dans cette vision futuriste, elles ne donnent pour une fois pas lieu à un ton catastrophiste ou déprimant, le danger qu’elles représentent étant contrebalancé autant par l’espoir qui anime les personnages que par l’attention portée à la beauté des paysages rencontrés.

Autres critiques : Célinedanaë (Au pays des cave trolls) ; Le nocher des livres

Passionnée d'histoire (surtout le XIXe siècle) et grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement) mais aussi d'essais politiques et de recherches historiques. Ancrée très à gauche. Féministe.

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