Science-Fiction

Toxoplasma

Toxoplasma

Titre : Toxoplasma
Auteur : David Calvo
Éditeur : La Volte
Date de publication : 2017 (octobre)

Synopsis :Après la Révolution, l’île de Montréal est assiégée — ses ponts bloqués par l’armée fédérale. Partout dans les rues se déchirent les partisans de l’ancien monde libéral et ceux qui aspirent à une société anarchiste, transformant le paysage urbain en un champ de ruines festif où survivent des communautés humaines en pleine recomposition. Au cœur de ce chaos, Nikki Chanson bosse dans un vidéo-club. Paumée mais pleine de talents cachés, elle partage son temps entre la refourgue de mauvais films aux mauvaises personnes, les enquêtes sur des faits divers sordides et les soirées film en compagnie de Kim, coureuse de bois virtuels. Mais entre ses hallucinations en VHS et ses rêves de forêts détruites, le quotidien de Nikki menace de s’engouffrer dans une conspiration meurtrière à laquelle elle ne pourra échapper que grâce au soutien de sa copine et d’une marionnette d’un show pour enfants qui n’est autre qu’un chien mort.

-C’est vraiment « The New Age » qui tire son épingle du jeu, en proposant une virée exponentielle dans la conspiration. Un mystère épais, paranoïaque, aux ramifications sans fin. Une plongée dans le glauque des salles polyvalentes, du mal en costume-cravate, du pouvoir tout-puissant des grilles de calcul, d’un capitalisme sans tête, sans âme, partout à la fois, qui sait tout, voit tout, entend tout, et des soldats de l’ombre qui luttent contre cet enfer conceptuel où l’humanité est aujourd’hui enfermée, célébrant la toute-puissance de la commodité sans se poser la question du pourquoi.
_ Oui, mais, est-ce qu’il y a une histoire d’amour ? demande le mâle, intrigué.
_ Ah, mais bien sûr monsieur. Il faut beaucoup d’amour pour faire exploser une tête.

Un roman complètement décalé…

Un « triller proto-cyberpunk ». Voilà comment les éditions La Volte définissent le dernier roman de David Calvo, récompensé il y a quelques mois par le Grand Prix de l’Imaginaire dans la catégorie « meilleur roman francophone ». Sur le coup, ça ne me disait pas grand chose, et c’est finalement après avoir eu l’occasion d’entendre l’auteur en conférence lors du festival des Étonnants Voyageurs que je me suis décidée à sauter le pas. Malheureusement, si l’expérience s’est révélée franchement atypique, je ne peux pas pour autant dire qu’elle m’ait vraiment plu, et ce pour tout un tas de raisons. D’abord, l’auteur ne s’embarrasse pas vraiment de détails concernant le contexte, si bien que j’ai eu un peu de mal à m’imaginer le décor : nous sommes à Montréal, à une période indéterminée mais néanmoins relativement proche de la notre, et l’armée encercle l’île sur laquelle s’est retranchée des anti-systèmes. On a donc affaire à sorte de Commune de Paris version canadienne, avec l’armée sur le point d’entrer dans la ville et provoquer un bain de sang que les habitants ne peuvent que se résoudre à attendre. Seulement tout cela, on met un peu de temps à le comprendre, si bien qu’on ne cerne pas tout de suite très bien les enjeux, d’autant que la situation n’est vraiment exposée qu’à de rares occasions, sous forme de podcast radio.

… qui m’a malheureusement laissée sur la touche

C’est d’ailleurs un autre élément intéressant mais aussi déstabilisant du roman : le changement fréquent de style. Émissions de radio, vidéo, échanges informatiques… : l’auteur varie souvent de modes de narration, parfois au dépend de la compréhension du lecteur. Je pense notamment aux conversations « internet » entre l’un des personnages et ses compagnons dans lesquelles on retrouve un jargon technologique très pointu auquel je suis restée totalement hermétique. Autre aspect déstabilisant : le caractère burlesque (voire complètement barré) de l’intrigue. On a quand même affaire à une héroïne qui attend la fin du monde en jouant au détective pour animaux, se met à avoir de grandes conversations avec une chaussette/marionnette après s’être découvert des talents de ventriloque, et connaît sur le bout des doigts absolument tous les pires nanars d’horreur de l’histoire du cinéma (si vous êtes fan, prenez de quoi noter parce que les références abondent). Je ne peux pas dire que ça m’ait déplu, en revanche j’ai eu beaucoup de mal à comprendre où voulait nous emmener l’auteur. L’intrigue repose en effet sur un ressort et des rebondissements tous aussi barrés que le reste de l’histoire dont je ne suis toujours pas certaine d’avoir saisi le fin mot.

« Toxoplasma » est donc un roman bourré d’idées intéressantes, qui ose expérimenter pas mal de choses, mais qui m’a déstabilisée plus que séduite. Trop burlesque, trop de références que j’ai pas saisi, trop de jargon… trop barré, tout simplement. Cela dit si tous ces éléments ne vous font pas peur, n’hésitez pas à tenter la découverte, vous devriez apprécier.

Autres critiques : Charybde ; Dionysos (Le Bibliocosme) ; Le chien critique ; Jean-Philippe Brun (L’ours inculte) ; Les chroniques du chroniqueur ; Le Rêvélecteur

Passionnée d'histoire (surtout le XIXe siècle) et grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement) mais aussi d'essais politiques et de recherches historiques. Ancrée très à gauche. Féministe.

4 commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.