L’orage qui vient

Titre : L’orage qui vient
Auteur/Autrice : Louise Mey
Éditeur : La Ville qui brûle / Pocket
Date de publication : 2022 / 2025
Synopsis : Mila a 15 ans. Depuis la Rétractation, elle vit avec sa mère et les autres femmes du Hameau. Cette communauté de femmes, solidaire et isolée se pensait à l’abri de la violence et de la folie qui ont ravagé le monde d’Avant. Mais le Hameau est menacé, et Mila va devoir laisser parler sa vraie nature…
-Vous n’avez pas peur, seules dans ce hameau, sans personne ?
De quoi parle-t-il ? Ce hameau est habité. Sans personne ? Elles vivent ici. Elle, Mila, et puis Ela, et Kine et ses enfants et…
– Il n’y a personne pour vous protéger.
D’abord elle ne comprend rien. Elle déteste ces moments car ils la font se sentir décalée, inadéquate, lointaine, si peu humaine. Puis son cerveau trouve la clé, et Mila comprend. Personne, pour Nathan, c’est « pas d’homme ».
Du post-apo avec de l’espoir…
Initié il y a quatre ans par Pocket, le label « Les étoiles montantes de l’imaginaire » propose de découvrir en poche des pépites de fantasy, de fantastique ou de SF, signées aussi bien par des auteurs et autrices déjà solidement implantés sur la scène de l’imaginaire français que par des novices. Récemment c’est « Poster girl », de l’autrice Véronica Roth, qui m’avait tapée dans l’oeil : un roman original sur l’après dictature et ses stigmates, à la fois politiques et psychologiques, le tout du point de vue d’une ancienne partisane du régime. « L’orage qui vient » de Louise Mey vient à son tour s’ajouter à la liste de mes coups de coeur inattendus. Avec un peu de retard je me suis rendue compte que j’avais déjà lu un roman de cette autrice (l’excellent roman jeunesse « La sans-visage ») et qu’elle m’avait déjà fait forte impression. La voilà donc qui recommence avec ce petit roman d’une centaine de pages à ranger dans la catégorie de ceux que l’on voudrait lire d’une traite. L’histoire met en scène Mila, une adolescente qui vit avec sa mère dans un petit village bien caché dans lequel ne vivent désormais plus que des femmes et des enfants. Ce hameau, on le comprend vite, est une petite bulle de tranquillité et d’harmonie née presque par miracle dans le chaos et la violence qui ont suivi la Rétractration, soit la disparition progressive de nos modes de vie actuels ainsi que de toute forme d’organisation étatique. Mila est une jeune fille taiseuse et parfois un peu étrange mais de bonne volonté et qui porte un amour sincère à son village et à ses habitants dont la sérénité va toutefois être perturbée par l’arrivée d’un homme. Un homme venu de la ville dans laquelle elles se rendent de temps à autre pour vendre leurs eaux guérisseuses. Un homme dont Mila se méfie dès qu’elle le voit et qui pourrait bien mettre en péril non seulement l’harmonie mais aussi la sécurité même du Hameau.
… et des femmes qui dépotent !
C’est à un thriller post-apocalyptique que nous convie ici Louise Mey, et le résultat est pour le moins efficace et addictif. Toute l’histoire nous est relatée selon le point de vue de Mila, cette jeune fille à laquelle on s’identifie immédiatement et qui séduit aussi bien par sa sincérité que par son caractère un peu brusque et renfermé. Les femmes qui gravitent dans son entourage sont elles aussi très bien caractérisées, l’autrice nous livrant ici une jolie galerie de femmes fortes, courageuses et astucieuses, mais chacune de manière très différente les unes des autres. L’hostilité que l’héroïne manifeste envers l’étranger ne tarde pas à se montrer communicative, si bien qu’on tourne les pages avec de plus en plus de nervosité à mesure que l’on soupçonne qu’un drame ne va pas tarder à advenir. Le roman est ainsi habité par une tension permanente qui va crescendo et entretient savamment la fébrilité des lecteurices à l’idée de ce qu’il pourrait arriver aux habitantes du hameau (jamais évoquée directement, la menace du viol est par exemple permanente dans l’éventualité où la position du village serait dévoilée). Contrairement à la plupart des ouvrages de fiction qui traitent de post-apo, cette menace pourtant n’est jamais présentée comme inéluctable (contrairement par exemple à l’excellent mais malaisant « Qui après nous vivrez » d’Hervé Le Corre), et les femmes ne sont pas mises en scène comme des personnages en situation de vulnérabilité constante. Au contraire, le roman repose sur un élément surnaturel qu’il serait dommage de dévoiler ici mais qui donne un avantage certain aux femmes du hameau. Femmes qui n’ont toutefois pas besoin de cela pour se défendre et s’auto-organiser et qui possèdent de multiples compétences utiles, y compris parfois les plus insoupçonnées. On éprouve une certaine jubilation à voir ces femmes du futur présentées autrement que dans la position de victimes en sursis, de même qu’à constater le décalage total entre l’attitude et les à priori de Nathan et le quotidien du Hameau, basé sur l’entre-aide, l’égalité et le respect de toutes.
Lecture coup de coeur, « L’orage qui vient » est un thriller post-apo féministe redoutablement efficace qui décrit l’arrivée d’un homme dans un village de femmes, avec tout le lot de menaces que sa présence fait peser sur les habitantes. Mila est une héroïne assez marquante, puissante et sauvage mais aussi bouleversante d’humanité A lire !
Autres critiques : ?

5 commentaires
Collectif Polar : chronique de nuit
Je viens de me l’acheter !
Boudicca
Alors bonne lecture 🙂
Tachan
Coup de cœur partagé, j’ai adoré découvrir cet univers, cette héroïne et surtout la façon dont l’histoire fut menée pour traiter cette masculinité toxique insidieuse. Je suis curieuse de lire d’autres romans de l’autrice.
Boudicca
De même, je viens d’acheter « Deuxième femme » et « Petite sale » qui ont l’air super également. Et ses romans jeunesse sont très bien aussi !
belette2911
Je le note de suite !