Promising Young Woman [Film]
Titre : Promising young woman
Réalisatrice : Emerald Fennell
Acteurs/Actrices : Carey Mulligan ; Bo Burnham ; Alison Brie ; Chris Lowell
Date de sortie française : 2021 (mai)
Synopsis : Tout le monde s’entendait pour dire que Cassie était une jeune femme pleine d’avenir…jusqu’à ce qu’un évènement inattendu ne vienne tout bouleverser. Mais rien dans la vie de Cassie n’est en fait conforme aux apparences : elle est aussi intelligente que rusée, séduisante que calculatrice et mène une double vie dès la nuit tombée. Au cours de cette aventure passionnante, une rencontre inattendue va donner l’opportunité à Cassie de racheter les erreurs de son passé.
A l’heure de la réouverture des lieux de culture et de loisir, je me suis rendue pour la première fois depuis longtemps dans une salle obscure pour voir un film que j’attendais avec impatience depuis des mois : « Promising young woman ». Récompensé aux Oscars dans la catégorie du meilleur scénario original, le long métrage d’Emerald Fennell réunit un jeune casting relativement peu connu, à l’exception de son actrice principale, Carey Mulligan. La présence de l’actrice, que j’avais déjà adoré dans « Loin de la foule déchaînée » (adaptation du roman de Thomas Hardy) et « Les suffragettes », ainsi qu’une bande annonce intrigante avaient titillé ma curiosité, et je ne regrette absolument pas d’avoir renoué avec le cinéma par le biais de ce film. Celui-ci met en scène Cassie, une jeune femme de trente ans ayant abandonné ses études de médecine plusieurs années auparavant suite à un drame sur lequel le film lève lentement le voile mais dont on comprend très vite qu’il implique le viol de sa meilleure amie de l’époque. Depuis, Cassie semble avoir fait une croix sur son avenir : elle vit chez ses parents, n’a désormais presque aucune interaction sociale et travaille dans un café toute la journée. Ses soirées, elles, sont un peu plus mouvementées, puisque la jeune femme arpente les clubs du coin en feignant d’être complètement saoule jusqu’à ce que, inévitablement, un homme lui propose de la raccompagner.. pour finalement l’entraîner chez lui et tenter de profiter d’elle alors qu’elle est à peine consciente. Imaginez la surprise du type lorsqu’il réalise qu’elle n’est pas du tout ivre, et qu’elle est passablement en colère. Le scénario laisse penser que le film pourrait s’inscrire dans la lignée du genre « rape and revenge » (agression de l’héroïne suivi de sa vengeance, généralement sanglante), mais il est finalement difficile de lui coller une étiquette : thriller ? comédie noire ? drame ? film de société ? Le propos d’Emerald Fennell est bien plus subtile que ce que le simple résumé peut laisser penser, et c’est cette finesse qui rend le film aussi marquant.
Le propos est incontestablement féministe et s’inscrit pleinement dans le mouvement de libération de la parole des femmes, porté notamment par le mouvement #Metoo. Pour l’héroïne, il est évident qu’une jeune femme inconsciente, incapable de répondre aux sollicitations de son partenaire, n’est pas en mesure de consentir à un rapport sexuel. Et c’est bien sûr le cas. Seulement le patriarcat a la vie dure, et on se rend compte que, malgré les discours progressistes de façade, la plupart des gens ont du mal à admettre que la responsabilité du viol n’incombe pas à la victime, même si elle était ivre morte. Le film met brillamment en lumière cette hypocrisie ainsi que le chemin qu’il reste à parcourir pour mettre un terme à la culture du viol, notamment dans le milieu estudiantin où l’excuse de la jeunesse est souvent avancée. Grâce à son ton particulièrement mordant, le long-métrage aborde le sujet de manière frontale, sans s’encombrer de grands discours mais aussi sans tomber dans la surenchère ou le sordide. En effet, à l’exception de la première scène qui montre l’agression de Cassie et qui est très inconfortable à regarder, la plupart des scènes vraiment violentes sont simplement suggérées : une légère traînée de sang sur la jambe de l’héroïne laisse entendre que le don juan a été puni, tandis qu’aucun flash-back concernant le viol subi par son amie n’est proposé. Même le sort réservé aux hommes qu’elle piège chaque semaine est sujet à caution dans l’esprit du spectateur puisque une autre scène témoigne d’une simple intimidation, et non de quelconques violences physiques sur les hommes ayant cherché à profiter d’elle. Le succès du film tient également à la performance de son actrice principale, Carey Mulligan, qui campe une héroïne tour à tour bad-ass ou vulnérable à laquelle on s’identifie sans mal. Son intelligence, sa manière de manier l’ironie et son machiavélisme nous la rendent immédiatement sympathique et il est indéniable que sa vengeance aura un effet cathartique sur bon nombre de spectatrices. N’allez toutefois pas vous imaginez un plan particulièrement retors et des scènes de confrontations spectaculaires : la leçon que Cassandra tente d’inculquer aux différents protagonistes du drame est davantage d’ordre psychologique que physique, et c’est justement ce qui fait la force du film. La conclusion, elle, est à la fois bouleversante et satisfaisante et on comprend sans mal pourquoi le film a été distingué par un oscar dans la catégorie du meilleur scénario.
« Promising young woman » est un film coup-de-poing qui n’a rien du traditionnel film de « rape and revenge ». Plus proche du thriller psychologique ou de la comédie noire, le long-métrage d’ Emerald Fennell séduit par la finesse avec laquelle il traite son sujet autant que par sa façon de l’aborder sans fard. La performance de Carey Mulligan est quant à elle remarquable : voilà une héroïne de cinéma que je ne suis pas prête d’oublier !
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2 commentaires
Tigger Lilly
Très belle chronique pour ce film si particulier, bravo !
Je n’avais pas reconnu l’actrice, j’avais beaucoup aimé Loin de la foule déchainée.
Boudicca
Merci 🙂 J’aime beaucoup cette actrice, elle choisit toujours des rôles originaux.