L’arabe du futur, tome 1 : Une jeunesse au Moyen-Orient (1978 – 1984)
Titre : Une jeunesse au Moyen-Orient (1978 – 1984)
Série : L’arabe du futur, tome 1
Scénariste : Riad Sattouf
Dessinateur : Riad Sattouf
Éditeur : Allary Édition
Date de publication : 2014
Récompenses : Fauve d’or du meilleur album d’Angoulême (2014)
Synopsis : Ce livre raconte l’histoire vraie d’un enfant blond et de sa famille dans la Libye de Kadhafi et la Syrie d’Hafez Al-Assad.
-On… on retourne en Syrie ?
-Évidemment, c’est bientôt la rentrée… Tu vas pas passer ta vie en vacances ! L’arabe du futur, il va à l’école !
Récompensé en 2014 par le Fauve d’or du meilleur album au festival d’Angoulême, « L’arabe du futur » relate l’enfance de l’écrivain et dessinateur Riad Sattouf dans le Moyen Orient des années 1970-1980. On fait connaissance dans ce premier volume avec la version miniature de l’auteur, adorable bambin à la chevelure blond platine qui revient sur les épisodes marquants de ses premières années, à savoir la rencontre de ses parents, son enfance en Libye puis en Syrie dans la famille de son père, et ses brèves escales en Bretagne dans la famille de sa mère. Tous les événements relatés ici sont donc le fruit des observations du jeune Riad qui se contente de rapporter ce qui, à l’époque, a pu le marquer ou l’interpeller au quotidien. L’auteur évite ainsi habilement de porter tout jugement d’ordre moral puisque la plupart du temps le petit garçon ne comprend pas bien ce qu’il voit ou entend. Cela implique forcément beaucoup de non-dits, notamment sur le contexte politique de la Libye ou de la Syrie de l’époque même si certains commentaires de l’auteur nous apportent quelques précisions bienvenues sur le sujet. Le regard innocent que pose le petit Riad sur le monde qui l’entoure n’empêche toutefois pas le lecteur de se faire une idée assez précise de la situation dans chacun de ces pays et des conséquences des régimes dictatoriaux imposés respectivement par Kadhafi et Hafez Al-Assad. C’est même le contraire.
Le portrait que brosse Riad Sattouf de la vie quotidienne dans ces deux pays est saisissant de réalisme mais aussi bien souvent inconcevable pour des lecteurs occidentaux. Difficile en effet de se faire à l’idée qu’en Libye il était impossible de laisser sa maison sans surveillance en raison de l’abolition par le régime de la notion de propriété privée. Ou qu’on pouvait, d’un jour à l’autre, être amené à changer de métier et ainsi passer du statut de professeur à celui de paysan et inversement. Mais c’est en Syrie que le fossé se fait le plus large. Le jeune Riad et ses parents vivent en effet à proximité de Homs, dans un village isolé où les conditions de vie sont loin d’être idéales. Par le biais de petites anecdotes judicieusement choisies mettant en scène différents membres de la communauté locale, l’auteur parvient à faire prendre conscience au lecteur du climat qui régnait à l’époque et des difficultés rencontrées par les habitants : pauvreté extrême de certaines familles, problèmes d’hygiène récurrents, antisémitisme assumé et revendiqué, place inférieure accordée aux femmes… Le héros reste malgré tout un petit garçon et certaines scènes touchent ainsi moins à son environnement qu’à ses propres peurs ou problèmes purement enfantins (l’école, les camarades de jeux…), même si certains de ces épisodes soulignent là encore le clivage existant entre le mode de vie occidental et celui de ce petit village syrien dans lequel le protagoniste a bien du mal à s’intégrer.
Un roman graphique original et judicieusement conçu par Riad Sattouf qui nous fait découvrir ce à quoi pouvait ressembler la vie quotidienne dans le Moyen Orient des années 70 et 80. L’innocence et la jeunesse de son protagoniste n’empêche pas l’auteur de dresser un portrait détaillé et édifiant de la Libye et de la Syrie de l’époque et il ne fait aucun doute que les albums suivants seront eux aussi très instructifs, et ce d’autant plus que le petit Riad va, en grandissant, être mieux à même de comprendre et d’appréhender différemment son environnement.
Voir aussi : Tome 2 ; Tome 3 ; Tome 4
Autres critiques : Alcapone (Embuscades d’Alcapone)
Aucun commentaire
belette2911
J’en avais entendu parler et j’étais tombée sur le cul aussi avec le concept de la propriété, mais ne chantons pas victoire trop vite, chez nous aussi tu peux en être dépossédé si lors de ton absence, des gens changent ta serrure… pour les foutre dehors, t’as intérêt à te munir de patience et de fric ! 🙁
Belzaran
Une BD passionnante !