Fantasy

Les sabres sacrés, tome 1 : Le sabre de neiges

Titre : Le sabre de neiges
Cycle/Série : Les sabres sacrés, tome 1
Auteur : Salomé Han
Éditeur : Albin Michel
Date de publication : 2025 (janvier)

Synopsis : On les appelle les Porteurs de Sabres Sacrés et on raconte qu’ils servent la volonté des Kami. Ils ne sont pas immortels, mais vieillissent différemment de nous, s’éloignant peu à peu de l’humanité. Maître Shiro, le Héron Blanc, est l’un d’eux. Il porte le Sabre de Neige, qui se nourrit du sang de ses victimes et procure cette extraordinaire longévité convoitée par l’Empereur en personne. Isao, dix-neuf ans, est son unique disciple. Ils vivent ensemble au cœur d’une forêt sacrée, se dévouant corps et âme à la Voie du Sabre. Quand Isao apprend que la tête du Héron Blanc est mise à prix et que leurermitage secret est découvert, tous deux se voient obligés de fuir. Confronté à un monde extérieur auquel les idéaux de la Voie du Sabre peinent à s’appliquer, Isao est déterminé à dépasser ses propres limites et à gagner le respect de maître Shiro, qu’il aime éperdument. Mais le jeune disciple ignore tout des dangers et des créatures qui se dresseront sur son chemin. À commencer par ses semblables : les hommes.

Un sabre magique, un maître et son disciple

Premier tome d’une trilogie, « Le sabre des neiges » est aussi le premier roman de l’autrice Salomé Han qui choisit de situer son histoire dans un Japon médiéval emprunt de magie. Le récit met en scène un jeune homme, Isao, et son maître, le porteur d’un sabre de légende accordant de grands pouvoirs à son possesseur ainsi qu’une longévité remarquable. Vivant depuis des années dans une forêt reculée afin d’échapper aux sbires de l’empereur, avide de récupérer tous les sabres magiques existants, le maître et son disciple vont toutefois voir leur tranquillité voler en éclat lorsque certains se mettent à émettre des doutes sur leur identité. Les voilà tous deux en fuite et en quête d’un nouveau refuge, avec des limiers plus ou moins redoutables à leurs trousses. Parallèlement à leur voyage, l’intrigue se focalise aussi sur la relation que les deux protagonistes entretiennent, l’admiration sans borne que voue le jeune Isao au porteur du sabre des neiges se muant peu à peu en une attirance de plus en plus difficile à contrôler. Voilà pour le pitch qui fait également intervenir de nombreuses créatures tirées du folklore japonais, de même qu’un certain nombre de concepts plus ou moins philosophiques. Je ne vais pas faire durer le suspens : je n’ai pas du tout accroché à cette lecture, et ce pour plusieurs raisons. Le début m’avait pourtant intriguée, avec cette immense forêt peuplée d’une faune mystérieuse dont les évocations ont pour ma part suffit à enflammer mon imagination (il faut dire que je ne lis pas souvent d’ouvrages mettant en scène la culture asiatique). Très vite pourtant, l’intrigue patine et la curiosité initiale finit par s’atténuer, voir s’éteindre. On suit donc sans véritable ennui, mais sans passion non plus, le périple d’Isao, d’abord pour échapper à ses poursuivants, puis pour retrouver la trace de son maître, mystérieusement volatilisé. Une quête dont la résolution s’avère trop prévisible et qui à aucun moment de permet de donner plus d’épaisseur à l’univers qui demeurera tout du long un simple décor vaguement exotique.

Érotisation problématique d’une relation toxique

L’intrigue comporte malgré tout quelques scènes marquantes qui auraient pu suffire à inciter à l’indulgence si la relation amoureuse au centre du roman n’avait pas été aussi problématique. L’aspect romantique occupe en effet une place bien trop grande dans cette histoire qui aurait pourtant gagné à la maintenir au second plan, et ce d’autant que cette romance n’a rien d’attrayante. La relation maître-élève qu’entretiennent Isao et Shiro pose en effet dès le départ problème dans la mesure où il existe un véritable déséquilibre entre eux, l’un étant totalement dépendant de l’autre qui semble prendre plaisir à souffler tantôt le chaud tantôt le froid. L’inconfort émotionnel dans lequel se trouve le personnage principal est ainsi un état d’autant plus désagréable pour les lecteurices qu’il semble sciemment entretenu par le second protagoniste. Cette érotisation d’un rapport de domination m’a posé problème tout du long du récit qui, par cet aspect, fleurte assez clairement avec la dark romance, un sous genre littéraire en vogue chez les jeunes adultes et qui met en scène des relations dominants/dominés plus ou moins empruntes de violences. Le parallèle est d’autant plus tentant que l’autrice décrit au milieu du roman une scène de viol ahurissante réutilisant de nombreux stéréotypes propices à la perpétuation de la culture du viol (il/elle dit non mais c’est en fait un oui inavoué, la preuve, le plaisir ressenti est colossal !). J’ai éprouvé beaucoup de colère à la lecture de cette scène et cela a certainement eu un impact sur ma perception de la suite du récit. Outre le duo principal, les autres personnages souffrent malheureusement d’un manque de profondeur qui empêche toute identification ou empathie, si bien qu’on voit les uns et les autres défiler avec une relative indifférence.

Avec « Le sabre des neiges », Salomée Han met en scène une relation maître-élève évoluant peu à peu en romance entre un jeune disciple et le porteur d’un sabre magique, le tout dans un Japon médiéval fantasmé. En dépit d’une première partie intéressante, la lecture de ce premier tome aura été une déception, les personnages comme l’univers manquant de l’épaisseur suffisante pour susciter l’immersion. L’érotisation de la relation toxique qu’entretiennent les deux protagonistes m’a aussi posé problème, et ce d’autant plus qu’elle s’accompagne de scènes dignes d’un roman de dark romance. Je passerai mon tour pour la suite…

Autres critiques : L’ours inculte ; Au pays des cave trolls ; Le culte d’Apophis

Passionnée d'histoire (surtout le XIXe siècle) et grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement) mais aussi d'essais politiques et de recherches historiques. Ancrée très à gauche. Féministe.

7 commentaires

  • Céline Danaë

    Merci pour cet avis qui reflète totalement ce que j’ai pensé de ce roman.
    Tu mets encore plus les mots sur tout ce qui m’a dérangé, tout comme Apophis
    La relation entre Isao et son maitre, la scène de viol plus le côté dark romance. Je passerai aussi mon tour pour la suite c’est clair

  • Tachan

    Je vois que nous avons tiqué sur la même problématique, la représentation des relations dans cette série. Quelle idée d’écrire encore ça de nos jours, frnachement !
    Pour le reste, je suis d’accord, ça se laisse lire mais sans rien de transcendant et c’est bien dommage car je rêve d’une bonne fantasy dans un univers asiatique, en dehors des romans de G.G.Kay bien sûr 😉

    • Boudicca

      Nos ressentis se rejoignent en effet 🙂 Oui j’aimerais aussi beaucoup, ça fait un moment que je n’ai pas lu de romans vraiment marquant dans cet univers (à part, comme tu le dis, les Guy Gavriel Kay et La voie du sabre » de Thomas Day)

  • Symphonie

    Presque toutes les chroniques que j’ai lues parlent de cet aspect Dark Romance, j’ai beau adoré les Yokai et apprécier les univers inspirés du Japon, je passe mon tour.

    • Boudicca

      Je ne peux pas t’en vouloir 😉 C’est effectivement un point que tout le monde a soulevé, et je trouve ça plutôt positif que ce genre de mise en scène ne passe plus aujourd’hui.

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