Malemort
Titre : Malemort
Auteur/Autrice : Aurélie Haderlé
Éditeur : ActuSF
Date de publication : 2024 (août)
Synopsis : L’histoire débute à Nidaros, capitale de la Norvège, au Xe siècle de notre ère.La christianisation du pays progresse et les vieux dieux sont de plus en plus contestés. Lors d’un grand banquet en présence de l’envoyé du pape, Osmond se met à déclamer une formidable saga, en hommage aux traditions vikings, comme un pied de nez au prêtre. Les oreilles des participants entendent alors l’histoire de Gyda, chamane issue d’une peuplade de la forêt. La prophétie dit d’elle qu’elle aura deux fils, aussi vaillant que courageux, mais qui mourront jeunes. Suite à une traitrise, elle parvient à en sauver un et à s’enfuir dans la forêt. Commence une vie sauvage pour Roderik, simple et intense. Mais qui peut vraiment se cacher de son destin ? Qui peut rester sourd aux appels de l’aventure ?
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Une plongée dans l’univers viking
Norvège. Xe siècle. Un banquet est organisé pour célébrer l’union de tous les Vikings du pays sous la bannière du roi Olaf. La concorde n’est toutefois qu’apparente, car très vite la question religieuse s’invite sur le devant de la scène. Car si le roi n’a pas renié les croyances païennes de son peuple et permet à ses sujets de continuer à pratiquer leur culte comme ils l’entendent, le christianisme gagne de plus en plus de terrain et entend bien occuper rapidement une position hégémonique. Aussi, lorsque le barde Osmond propose de déclamer une saga consacrée à l’histoire de l’un de ses ancêtres, véritable ode aux traditions vikings, le prélat chrétien présent au banquet ne peut s’empêcher d’intervenir pour tenter d’obtenir du roi une condamnation claire. Captivée, l’audience ne tarde toutefois pas à laisser de côté ces considérations politiques pour se concentrer sur l’histoire de Gyda, femme chamane possédant un lien étroit avec la forêt et ses esprits, mais aussi celle de son fils Roderik, devenu depuis héros légendaire. Aurélie Haderlé nous plonge avec ce roman dans une histoire typique des grandes sages nordiques dont elle s’est très largement inspirée. Animé par le désir de venger sa famille massacrée, le protagoniste va ainsi être amené à affronter de nombreux dangers, qu’ils soient de nature physique ou surnaturelle, et il aura autant besoin de ses talents de guerriers que de son ingéniosité pour venir à bout de ses ennemis. Le récit des aventures de Roderik est loin d’être ennuyeux, pourtant je ne suis pas parvenue à accrocher à ce roman certes distrayant mais presque trop académique.
Des maladresses et un manque d’originalité
Le premier aspect qui m’a dérangée réside dans la surabondance de notes de bas de page qui viennent en permanence interrompre l’immersion. C’est d’autant plus gênant que ces notes sont, pour la grande majorité d’entre elles, inutiles : soit parce qu’elles définissent un terme dont on peut comprendre le sens aisément dans le contexte de la lecture, soit parce qu’elles se contentent de faire référence à une source documentaire. Or, dans un ouvrage de fiction, quel peut bien être l’intérêt de faire référence à des travaux académiques ? Il ne s’agit pas ici d’un mémoire de recherche, et on se doute que l’autrice s’est documentée sur son sujet, nul besoin de nous ensevelir sous les références pour prouver son sérieux ou nous expliquer par le menu tous les aspects de la culture viking ! Une bibliographie a d’ailleurs été ajoutée à la fin du roman (ainsi qu’une interview de l’autrice), et elle aurait parfaitement suffi à rendre hommage aux ouvrages et spécialistes consultés par l’autrice, sans encombrer la narration. Le second aspect qui a contribué à modérer mon enthousiasme réside dans le manque d’originalité du roman qui reprend tous les codes des sagas nordiques sans vraiment se les réapproprier ou tenter de les subvertir. Il en résulte des personnages extrêmement stéréotypés et peu attachants, Roderik faisant par exemple figure de gentil benêt entraîné à droite à gauche sans jamais être véritablement acteur de son histoire. Les personnages secondaires ne sont pas plus développés, et le traitement réservé aux femmes est assez maladroits, celles-ci étant constamment réduites aux sempiternels rôles d’enjeu de séduction ou de marâtre égoïste ou cruel.
Dans « Malemort », Aurélie Haderlé rend hommage aux sagas nordiques traditionnelles en narrant l’histoire d’un héros dont le périple est censé exalter les valeurs et la culture vikings, sacrément mis à mal par l’irrésistible ascension du culte chrétien. L’autrice s’est beaucoup documentée pour écrire son roman qui nous livre de nombreuses informations sur le contexte historique et les traditions vikings, mais le roman est, d’une certaine manière, trop scolaire. La surabondance de notes de bas-de-page et le manque d’originalité des personnages rendent ainsi la lecture un peu monotone et contribuent à limiter l’immersion.
Autres critiques : Célinedanaë (Au pays des cave trolls)