Scholomance, tome 3 : Les enclaves dorées
Titre : Les enclaves dorées
Cycle/Série : Scholomance tome 3
Autrice : Naomi Novik
Éditeur : Pygmalion
Date de publication : 2024 (février)
Synopsis : La seule chose dont on ne parle pas quand on est à Scholomance, c’est de ce qu’on fera quand on en sortira. Si on en sort. Je suis sortie, et je n’ai même pas eu à me transformer en une monstrueuse sorcière pour y parvenir. Nous avons sauvé la promotion, rendu la Terre sûre pour tous les sorciers et apporté la paix et l’harmonie dans toutes les enclaves. Ha ha, je plaisante ! En fait, tout a mal tourné…
…
Un final spectaculaire…
« Scholomance » est une trilogie young adult écrite par Naomi Novik et mettant en scène la scolarité d’une jeune femme dans une école réservée aux jeunes sorcier.es. Une scolarité pour le moins mouvementée puisque les adolescents qui y sont enfermés sont la cible d’une multitude de créatures toutes moins ragoutantes les unes que les autres et qui ne désirent rien tant que de se nourrir de leur personne. Alors certes, ils sont plus en sécurité à l’intérieur de l’établissement que dehors pendant toute la période que dure leur adolescence (période à laquelle ils sécrètent une hormone qui les rend irrésistibles pour tous les monstres des environs), mais survivre jusqu’à la remise des diplômes reste tout de même loin d’être une sinécure. Surtout si, comme notre héroïne, vous n’appartenez à aucun clan puissant à même de vous fournir suffisamment de combustible tout au long de votre scolarité pour affronter les nombreux dangers qui vous attendent. Ou du moins était-ce le cas avant l’arrivée à la Scholomance de Galadriel (El, pour les intimes). [Attention, si vous n’avez pas encore eu l’occasion de lire les deux précédents volumes, je vous conseille de passer directement au paragraphe suivant sous risque de SPOILERS.] En effet, le dernier tome se concluait par un sacré coup de théâtre remettant totalement en cause l’existence même de la Scholomance, ce qui laissait à penser que le troisième et dernier opus trancherait radicalement avec les précédents. Et c’est bel et bien le cas, dans la mesure où l’environnement familier de l’école a cette fois disparu et que notre héroïne retrouve le monde du dehors, le vrai. Son retour n’a toutefois pas grand-chose à voir avec les retrouvailles émouvantes et joyeuses qu’elle attendait puisqu’il s’accompagne de la disparition d’Orion, son petit-ami, vraisemblablement avalé par une gueule-béante juste avant de franchir le portail de la Scholomance. A cela s’ajoute un climat ambiant particulièrement tendu puisque de plus en plus d’enclaves sont victimes de violentes attaques, et que celle de Londres est justement en train de flancher.
… mais décevant
Comme on pouvait s’y attendre ce troisième tome se révèle donc assez différent des autres puisqu’il se déroule pour la première fois en dehors de la Scholomance, même si celle-ci demeure toujours au cœur du sujet. Le pari était risqué et n’est pas tout à fait maîtrisé, l’univers des enclaves, que l’autrice nous fait visiter les unes après les autres, faisant finalement assez pâle figure comparé à celui de cette école avec laquelle on avait appris à se familiariser. De Londres à Pékin en passant par Dubaï ou encore New York, Naomi Novik nous fait voir du pays, fidèle en cela à sa volonté manifeste tout au long des précédents tomes de ne pas présenter une vision de son univers trop « occidentalo-centrée ». Mais alors, si El n’est plus occupée à tenter de survivre à sa remise de diplôme, à quoi peut-elle bien maintenant s’occuper. Et bien à sauver le monde des sorcier.es, rien que ça ! On savait déjà que la jeune femme était dotée de capacités hors normes, mais là l’autrice lui fait exploser tous les records, au risque parfois de perdre en crédibilité. Car c’est un peu le problème avec les personnages sur-puissants à propos desquels les auteurs/autrices s’affranchissent des règles qu’ils se sont pourtant donnés du mal à élaborer et expliquer : on en vient à se détacher de leur sort. Évidemment, puisqu’iels semblent increvables et capables de vaincre tout et tout le monde. Et bien c’est un peu ce qui se passe ici avec El qui devient une sorte de super machine à tuer des gueules-béantes (créatures pourtant éminemment redoutables) au point qu’on en vient à se désintéresser du combat puisque son issu ne fait peu à peu plus aucun doute. Pourtant la jeune femme se révèle toujours aussi sympathique, notamment parce que l’attention qu’on lui accorde désormais n’a en rien atténué sa mauvaise humeur, son côté un peu misanthrope ni sa droiture. Le personnage possède en effet une personnalité intéressante reposant sur un équilibre fragile et quelque peu paradoxal entre d’un côté une profonde envie de faire le bien et de ne causer de mal à personne, et de l’autre une tolérance très limitée aux autres et à leurs contradictions.
Une œuvre qui pose des questions intéressantes
Les personnages qui gravitent dans son entourage sont quant à eux toujours aussi attachants, ou plutôt attachantes, car il s’agit dans la grande majorité de femmes. Ces dernières occupent ainsi un rôle de premier plan et possèdent une grande variété de profils dans lesquels tout le monde pourra se retrouver. La relation qu’El entretient avec Orion occupe toujours une place dans l’intrigue, même si cette dernière est loin de se limiter au classique récit de romance initiatique recouvert d’un vernis superficiel de fantastique. Là, l’histoire d’amour est reléguée au second plan mais les quelques scènes qui en font mention sont loin d’être les plus intéressantes, même si elles ont pour mérite de mettre en avant une relation dans laquelle la jeune femme sait ce qu’elle veut, exerce une sexualité épanouie et n’est pas considérée comme étant la propriété de son compagnon. En dépit de l’affection que l’on porte à l’héroïne et de la satisfaction ressentie face à la volonté claire de l’autrice de mettre à mal un bon nombre de stéréotypes, il faut reconnaître que ce troisième tome n’a rien d’exceptionnel. Sa construction est très répétitive, et les éléments d’explication qu’on nous fournit concernant le fonctionnement des enclaves ou l’histoire de la Scholomance sont finalement assez prévisibles et n’apportent pas grand-chose à l’univers. Bref, si on peut là encore saluer la volonté de Naomi Novik d’amorcer une réflexion politique sur les inégalités de classe, cela ne suffit pas à rendre palpitante une intrigue dont la délocalisation a fait perdre une partie de son charme.
Troisième tome de la trilogie « Scholomance », « Les enclaves dorées » se révèle un peu décevant par rapport aux autres tomes, même si la série dans son ensemble demeure tout à fait satisfaisante. Par son décor, son héroïne décalée, la diversité culturelle qu’elle donne à voir ou encore les thématiques qu’elle aborde, la trilogie de Naomi Novik permet aux lecteurices de passer de bons moments dans une ambiance« Poudlard », en plus sombre et plus politique.
Voir aussi : Tome 1 ; Tome 2 ; Tome 3
Autres critiques : ?
Un commentaire
Le Nocher des livres
Ah, il est paru : je l’avais loupé, celui-là. Merci pour l’info et ton avis.