Un pape pour l’apocalypse
Titre : Un pape pour l’apocalypse
Auteur : Jean-Luc Marcastel
Éditeur : Pygmalion [site officiel]
Date de publication : 11 octobre 2017
Synopsis : À Aurillac, le capitaine Malo Sinclair s’ennuie…
Il faut dire que Malo, jeune as prometteur de la police criminelle du quai des Orfèvres, avait tout pour monter vite et haut dans la hiérarchie… s’il n’avait eu la malheureuse idée de démolir le portrait d’un suspect, fils d’un ministre. Pour le protéger autant que pour le punir, son chef a décidé de le mettre « au vert ». Et pour ce faire, quoi de mieux qu’Aurillac, préfecture du Cantal, où l’on compte plus de vaches que d’habitants ?
Après deux ans, Malo est à la limite de la dépression.
C’est alors qu’on l’appelle pour une affaire de vol sur le chantier de fouille de l’abbaye Saint-Géraud récemment mise à jour. Une tête mécanique, incroyable vestige, presqu’une légende urbaine, a disparu. Enfin une affaire qui sort de l’ordinaire ! Mais, quand les cadavres pleuvent, Malo ne peut se dire qu’une chose : il n’en demandait pas tant…
Un polar ésotérique autour du personnage de Gerbert d’Aurillac, le sulfureux Pape de l’an Mil.
Dans ce pays, certains tenaient l’alcool de manière ahurissante. Il avait eu un jour le cas d’un type qui s’était cassé une cheville en sortant de chez lui compètement rond. On l’avait ramassé et ramené au poste pour dégriser. Par acquit de conscience, on avait fait une prise de sang… Elle était revenue avec la note « Record ! Sept grammes ! ».
À Épinal, au festival des Imaginales, il y a de plus en plus de lectures semi-improvisées réalisées par les auteurs eux-mêmes, souvent de leur dernière sortie littéraire. Il en fut ainsi de Jean-Luc Marcastel et de son premier thriller paru chez Pygmalion, Un pape pour l’apocalypse. Et quelle verve, quelle gouaille ! L’écouter lire son premier chapitre ne pouvait que donner envie de découvrir la suite !
Polar classique
Nous suivons Malo Sinclair, capitaine de police mis de côté dans un commissariat d’Aurillac. Il s’ennuie ferme, mais prend la situation avec une relative bonhommie tant la vie cantalienne peut être surprenante à défaut de concentrer de grands crimes à résoudre. Son point de vue est clairement neutre au départ, il est le narrateur par excellence, puisqu’il sert de catalyseur à un certain nombre de situations et permet de découvrir l’incongruité de certains personnages. Pour autant, il est prêt à se jeter à corps perdu dans l’enquête qui s’annonce sur une découverte liée au passé médiéval de sa ville : le vol d’une tête mécanique a eu lieu sur un site de fouilles près de l’église principale et certains témoins sont retrouvés morts. C’est l’occasion pour lui d’entraîner un coéquipier digne d’un ours, le lieutenant Albert, et une jolie professeure, Mademoiselle Mignon, par monts et par vaux à la poursuite d’un personnage machiavélique.
Thriller ésotérique et cantalou
Un pape pour l’apocalypse est un thriller ésotérique et cantalou. Ces deux aspects sont primordiaux pour saisir le sel de ce récit. Non seulement l’auteur joue énormément sur les poncifs du genre du thriller porté sur les découvertes de connaissances longtemps cachées dans une ambiance de complot religieux, mais en plus les met en décalage avec l’ambiance très détendue, bon enfant voire potache de l’univers patoisant qu’il montre des habitants du Cantal. Alors bien sûr avec l’ésotérisme, il y a toujours le risque d’aller trop loin, et là il faut reconnaître que Jean-Luc Marcastel a utilisé le maximum d’informations possible sur l’alchimie médiévale : Gerbert d’Aurillac fut un personnage sulfureux déjà de son vivant, savant reconnu, mathématicien, mécanicien, fervent partisan des échanges culturels de part et d’autre de la Méditerranée, faiseur de rois en France, en Germanie et en Italie, précepteur de l’empereur Otton III et finalement pape pendant quatre années au tournant du fameux « An mil » qui inspire toujours beaucoup les théories millénaristes et eschatologiques. Il y avait énormément d’éléments potentiellement « magiques » à incorporer à ce personnage (sa réputation date d’au moins le XIIe siècle) et Jean-Luc Marcastel va plutôt loin, reprenant et poursuivant les légendes du livre Le Matin des magiciens (introduction au réalisme fantastique), de Louis Pauwels et Jacques Bergier d’octobre 1960 qui détaillent les technologies mises en œuvre par Gerbert d’Aurillac. Chaque découverte fabuleuse faite par notre trio de choc est évidemment contrebalancée par un humour constant (d’où la très forte utilisé du personnage d’Albert, d’ailleurs prénom d’un autre grand ecclésiastique spécialiste de l’alchimie et de la magie populaire).
— Ils sont tous comme ça, là-bas ?
— Non… Albert est un modèle unique… Je pense qu’on a cassé le moule à la naissance quand on a vu ce qui en sortait.
Ce Pape pour l’apocalypse fut donc une très bonne surprise et, même s’il n’y a rien d’inoubliable dans l’intrigue, c’est un récit qui vaut un très bon moment de lecture et quelques rires amusés.
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