Le Silence des morts
Titre : Le Silence des morts
Auteur : Jean-Paul Nozière
Éditeur : Rivages (Rivages/Noir) [site officiel]
Date de publication : mars 2006
Récompenses : Grand prix du polar de Cognac 2006
Synopsis : Christian Milius est surnommé Slo à cause de son dilettantisme et de son goût pour la danse. Il mène une existence solitaire seulement ponctuée par des virées dans la boîte à tango de son copain Henri et par des visites à sa sœur Maud, internée dans un hôpital psychiatrique. Capitaine de police à la retraite, il ne se remet pas d’avoir bâclé sa dernière affaire : un arabe, ex-flic, retrouvé mort en pleine campagne dans des circonstances étranges. Slo avait hâtivement conclu au suicide, malgré les dénégations de la sœur du mort. Pour apaiser ses remords, il reprend l’enquête à zéro, hors de toute légalité.
La fin justifie les moyens, alors pensez sans cesse aux résultats, pas aux cris des culs-bénits de tout poil et autres gauchistes. Attention, vos limites sont « pas d’emmerdes avec l’I.G.S. ».
Les polars de la collection Rivages/Noir sont immuables et recèlent bien souvent de bonnes histoires. Il en va ainsi du roman Le Silence des morts, de Jean-Paul Nozière, paru en 2006.
Un personnage à la dérive
Christian Milius prend sa retraite de capitaine de police. Moqué par ses désormais ex-collègues pour sa lenteur et sa désinvolture face à ses dernières enquêtes, il termine sur un rapport bâclé à propos du suicide d’un SDF qui campait aux abords de la ville. Or, quelques jours après, il ressasse et, pour occuper ses journées, il reprend son enquête, persuadé d’avoir loupé quelque chose de bizarre, voire un coup énorme. Nous suivons là un personnage complètement décrépi, qui assume mal d’avoir laissé son travail à la dérive et qui connaît des mésaventures familiales tragiques. En effet, il a accumulé les tragédies et les désastres : sa sœur, dans un accès de folie, a tué père et mère ; sa femme, à force de boire, s’est tuée dans un accident de voiture ; ses deux filles ne lui parlent plus et attendent sa mort ; son fils ne vient jamais le voir et lui ment sur son chômage. Le rêve, quoi ! Pour compenser cette situation, il s’accroche à son enquête comme une moule à son rocher et, avec le soutien (en alcool) de son ami Henri, tenancier d’une salle de danse, et de Ghislain, un jeune gigolo qu’il vient de rencontrer, il se rend compte que le soi-disant suicide cache d’autres disparitions suspectes.
J’ai toujours détesté l’arrogance de ces personnes qui se croient tout permis, soit parce qu’elles sont riches, soit parce qu’elles détiennent un pouvoir. Souvent, les deux vont ensemble.
Polar noir
L’auteur donne ici une suite relative à sa série d’enquêtes mettant en scène le flic Slimane Rahali. Il met alors en parallèle avec l’histoire (dans des chapitres plus courts et plus vifs) de Selma qui entame depuis l’Algérie un périple pour amener en France une fille d’islamiste tout juste vendue. On le sent dès le départ : dans cette enquête, les thématiques vont être assez plombantes. Et nous ne sommes pas dessus : l’abus économique et physique des personnes en situation précaire, le rapt et le viol de jeunes immigrées, la gestion managériale d’un service public de la police, le commerce illégal de produits dangereux, etc. À l’image de son antihéros, ce polar est noir et dépressif : entre les planques misérables et les frigos vides, on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a quand on a peu, car continuellement les gens d’en-bas prennent coup sur coup de cette « société libérale de merde » comme le dit Christian et il est temps qu’il fasse cesser cela, à son petit niveau en tout cas.
Le Silence des morts est donc un bon moment de lecture, pas très joyeux c’est certain, mais efficace dans son propos et intéressant dans son choix de personnage.
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