Essence
Titre : Essence
Scénariste : Fred Bernard
Dessinateur : Benjamin Flao
Éditeur : Futuropolis
Date de publication : 4 janvier 2018
Synopsis : Achille, un jerrican à la main, déambule dans un dédale de couloirs dans un bâtiment immense, étrange… Enfin, il trouve une ouverture. Ébloui par le soleil, il se dirige vers une Ford Mustang blanche. À côté, une belle femme brune l’attend. Ils vont pouvoir repartir. La femme lui demande de reprendre le cours de ses souvenirs alors qu’ils roulent dans un paysage désertique. Se souvient-il de ce qu’il lui est arrivé avant de se retrouver ici, avec elle ? Achille a mal à la nuque et voit un étang gelé dans la brume, une Porsche 911 jaune en plein milieu, à moitié immergée. Un homme semble être à l’intérieur… Mais ça ne peut être lui, il n’a jamais eu de Porsche… Et puis qu’est-ce qu’il fait là, dans cette voiture, avec elle, alors qu’il ne l’a jamais vue et ne connaît même pas son nom ? Alors, elle lui révèle la vérité : il est au « paradis » (plutôt le purgatoire, ou la purge) des pilotes, et elle est son ange gardien. Pour en sortir, il va falloir comprendre comment il est mort pour trouver la paix…
Ne faites confiance à personne, encore moins aux piéton s! C’est moi votre ange gardien. Venez avec moi, on a assez perdu de temps comme ça.
Paré d’une jolie couverture toute en lumière avec sa vue en plongée, Essence, le roman graphique de Fred Bernard et Benjamin Flao attire l’oeil, de même que son format généreux et tout carré. Comme à son habitude, le travail d’édition de Futuropolis est à saluer et attrape le lecteur qui déambule dans les rayonnages de sa librairie préférée. Départ pour le paradis des pilotes.
Essence, c’est un roadtrip au purgatoire. Celui des pilotes. Enfin dans la purge, comme l’appelle mademoiselle. Elle est l’ange gardien d’Achille, grand amateur de voitures, mort il y a peu, mais qui a perdu la mémoire de son trépas. Infichu de se rappeler de quelle façon il est passé de l’autre côté, Achille arpente les étendues désertiques de la purge en Ford Mustang à la recherche de sa mémoire et d’essence pour pouvoir continuer d’avancer toujours un peu plus loin.
L’histoire d’Essence oscille entre les genres, à la fois polar sur fond d’espionnage et d’écologie, science-fiction et onirisme total. C’est un récit initiatique dans lequel Achille part à la rencontre de sa mémoire et de sa vie et le lecteur découvre le personnage au même rythme qu’il se redécouvre lui-même par les informations que lui fait donner ou deviner l’ange. Plus qu’à Achille lui-même, c’est davantage au duo que l’on s’attache avec leur relation qui évolue tandis que les kilomètres défilent. L’enquête que mène le personnage est menée avec une grande fluidité et on en démord pas. Fred Bernard ne donne pourtant pas dans le grand spectacle, mais tout est maîtrisé du début à la fin et c’est un véritable plaisir d’avancer dans le récit.
Au dessin, Benjamin Flao délivre des planches exceptionnelles aux styles très variés sans pour autant que cela nuise jamais au rythme de la lecture. Les planches à la peinture alternent avec celle dans la lignée de la bande-dessinée franco-belge. Le dessinateur nourrit Essence de références à ceux qui ont sans doute été de grandes inspirations. Au détour des pages on se retrouve le temps d’une planche plongée dans L’Affaire Tournesol, Mademoiselle n’est pas sans rappeler le trait d’Hugo Pratt, de Moebius ou encore de Franquin pour d’autres illustrations. Une variété dont on ne se lasse jamais. Essence fait aussi le plein (haha) de références cinématographiques avec des étendues désertiques qui ne sont pas sans rappeler Mad Max, ou encore ces lignes droites interminables où l’on croise nul autre que James Dean au volant de sa Porsche. Un étrange bâtiment fait aussi vibrer ma corde Miyazaki. Le découpage d’Essence est enfin au moins aussi varié que le trait, avec de nombreuses illustrations en pleine page voire en double page ou encore ces cases qui débordent d’une page sur celle d’à côté.
Fred Bernard et Benjamin Flao emportent leur lecteur dans un voyage halluciné qui sent l’asphalte et la gomme qui y brûle. Un récit plein d’onirisme, mâtiné d’action et bourré de références autant que de talent.
Autres critiques :
3 commentaires
Dionysos
« Essence fait le plein… »
Vous ne manquez pas de souffle.
Casper
Quel talent 🙄
Dionysos
Se moquer, c’est mal. 😛