Thomas le Rimeur
Titre : Thomas le Rimeur
Auteur : Ellen Kushner
Éditeur : Folio SF
Date de publication : 2002
Synopsis : Pour s’être risqué au baiser offert, Thomas le fameux Rimeur se retrouva prisonnier de la Reine des Elfes. Grand vivant s’il en fut, et joyeux compagnon, Thomas vécut près d’elle sept années, dans les voluptueux plaisirs du royaume de Faërie, avant de retourner dans son monde premier, celui du labeur, de la peine, et de la fuite du temps. Hanté, tourmenté par les souvenirs des splendeurs perdues, il lui fallut, malgré tout, retrouver la femme qu’il aimait, reconstruire sa harpe. Et vivre avec les cadeaux ambigus de la Reine des Elfes, le don de prophétie et la malédiction de la parole vraie. Salué dès sa parution comme un chef-d’œuvre, mêlant action, poésie et mystère, Thomas le Rimeur a été couronné par le World Fantasy Award et le Mythopoetic Award.
Mais moi je te connais, Thomas le Rimeur. Thomas à l’esprit vif et aux doigts agiles. Je suis venue te chercher afin que tu joues pour moi, Thomas, car ton renom est parvenu jusque dans mon pays. Fais-moi entendre ta musique, Rimeur, et narre-moi tes récits.
Un poète au pays des fées
Angleterre. XIIIe siècle. Un homme frappe à la porte d’une petite chaumière isolée afin de s’y abriter quelques heures de la pluie. Meg et Gavin, les occupants du lieu, l’accueillent bien volontiers, même si les manières de l’étranger semblent davantage convenir à la cour d’un roi qu’à leur pauvre masure. Et c’est vrai que ce dernier a l’habitude de côtoyer les puissants, lui dont le talent de barde n’est plus à prouver et dont les chansons égaillent les veillées des seigneurs des environs. Ce barde, c’est Thomas le Rimeur, un nom qui vous dira peut-être quelque chose puisqu’il s’agit du héros d’une célèbre ballade écossaise, elle-même inspirée par un véritable musicien et poète qui aurait vécu au XIIIe siècle. L’histoire est bien connue, et voici, en substance, ce qu’elle raconte : alors qu’il profite d’un repos bien mérité au pied de l’arbre d’Eildon,le barde Thomas reçoit la visite de la reine des Elfes qui, après lui avoir donné un baiser, l’entraîne avec elle dans le pays des Fées. Il y demeurera sept années, sans vieillir, mais aussi sans avoir le droit d’adresser la parole à d’autres créatures qu’à la reine elle-même. Celui que l’on surnomme alors le « rimeur » rejoindra ensuite son monde avec, en cadeau, le don de prophétie et du « parler vrai ». Déjà célébré en tant que musicien, le voilà désormais réputé pour ses talents de divination qui le rendent aussi célèbre que le mythique Merlin l’Enchanteur. C’est ce récit qui sert de trame au roman d’Ellen Kushner, une œuvre d’une grande sensibilité et justement récompensée en 1990 par le World Fantasy Award.
Ellen Kushner, dans les pas des bardes
Le roman est découpé en quatre parties dans lesquelles s’expriment chaque fois un narrateur différent : Gavin (le paysan qui offre au barde le gîte et le couvert au début du roman) ouvre la danse, suivi par Thomas lui-même, puis Megan (l’épouse du premier) et enfin Elspeth (une jeune fille qui vit à proximité). Chacun des narrateurs possède une manière de parler bien particulière : Meg et Gavin, issus de la campagne, s’expriment ainsi avec un style qui se rapproche parfois du patois, tandis que Thomas adopte un langage plus sophistiqué tout en nous faisant profiter de quelques extraits des chansons dont il est l’auteur. Ce travail effectué par Ellen Kushner sur la langue est une véritable réussite et ajoute à la musicalité du récit (chapeau d’ailleurs à la traductrice qui fait ici un superbe travail !) L’intrigue en elle-même est assez classique et reste fidèle à la ballade d’origine. On est d’abord frustré de voir Thomas quitter le monde des hommes, tant on est impatient de voir comment va évoluer sa relation avec Elspeth, mais on se laisse rapidement prendre au charme du Pays des Fées et de la Reine des Elfes qu’on quitte à son tour à regret. La plus grande réussite du roman reste ses personnages pour lesquels on ressent immédiatement une forte empathie, qu’il s’agisse de l’attachant couple de paysan dont le pragmatisme se heurte souvent à la fâcheuse tendance du Rimeur à s’apitoyer sur son sort, ou encore de Thomas lui-même qui peut agacer parfois mais dont on ne peut pourtant s’empêcher d’apprécier l’humour et l’habilité.
Ellen Kushner signe avec « Thomas le Rimeur » un très beau roman basé sur une histoire certes classique mais portée par une superbe plume, pleine de poésie. Une parenthèse enchantée qui fait un bien fou et que je vous recommande chaleureusement.
Autres critiques : Célindanaé (Au pays des cave trolls)
14 commentaires
lutin82
Ah! je me demandais depuis un moment ce qu’il valait ce roamn. Avec cette critique très convaincante et l’envie de lire une belle plume, je suis séduite. Allez hop! je note!
Merci!
Boudicca
Chouette, c’est vraiment une très belle histoire, bien racontée 🙂
Sophie - La Labyrinthèque
Cela donne envie. L’aspect raffiné et poétique doivent très bien servir ce genre de trame.
Boudicca
Tout à fait 🙂
Vert
Je l’ai lu il y a bien des années, je m’en souviens à peine… mais j’avais dû beaucoup aimé vu que j’ai gardé le livre !
Boudicca
Il a l’air d’avoir rencontré des retours positifs en effet 🙂
Lorhkan
J’avais commencé à le lire dans le bus au moment des Utopiales de cette année. J’avais d’autres choses sur le feu donc je l’ai mis de côté, mais le début m’avais beaucoup plu, et je m’étais dit que j’allais forcément y revenir.
Et donc tu confirmes que c’est un très bon roman, il faut vraiment que je m’y replonge. Merci pour le rappel. 😉
Lupa
Cela fait un bail que ce roman m’attire ! Je n’ai plus d’excuses pour ne pas céder à son appel maintenant, merci 😉
Boudicca
J’espère qu’il te plaira autant qu’à moi. Ce fut vraiment une jolie parenthèse enchantée 🙂
Acr0
Ce livre est arrivé entre mes mains par le hasard. Il avait été mis en avant dans ma bibliothèque, je suis tout simplement repartie avec. J’avoue avoir eu un a priori en me retrouvant dans un texte à l’eau de rose (féérique) mais il n’en a rien été. Comme tu l’écris, ses personnages sont réussis et réalistes.
Boudicca
J’avais un peu peur aussi et cela faisait plusieurs années que je l’avais repéré. J’ai profité de la présence de l’auteur aux dernières Utopiales et je ne le regrette pas 🙂
Elhyandra
Coucou,
Le texte fait assez classique mais c’était une jolie histoire, j’ai beaucoup aimé tous ces beaux paysages verdoyants et surtout le Pays des elfes.
Boudicca
C’est ça, une belle promenade en somme 🙂
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