Les vieux fourneaux, tome 4 : La magicienne
Titre : La magicienne
Série : Les vieux fourneaux, tome 4
Scénariste : Wilfrid Lupano
Dessinateur : Cauuet
Éditeur : Dargaud
Date de publication : 2017 (novembre)
Synopsis : Après une tournée d’été du théâtre du « Loup en slip », Sophie et Antoine rentrent au bercail… pour découvrir leur charmant village en pleine effervescence ! Le projet d’extension de l’entreprise Garan-Servier, qui relancerait l’économie de la région, est menacé… par une mystérieuse « magicienne dentelée » occupant le terrain. Branle-bas de combat pour les zadistes ! Cela dit, c’est un coup de bol pour les vieux fourneaux, qui peuvent enfin partir à la recherche de leur trésor oublié… Quant à Sophie, elle apprend une délicate vérité au sujet de son père…Confidence pour confidence, révélera-t-elle enfin l’identité du père de sa fille, Juliette ?
-Bandes d’égoïstes ! C’est bien la France, ça ! Vous passez votre temps à râler que rien de change, et quand ça change, vous gueulez que ça sera plus comme avant !
-Eh ben quoi ? On veut le changement mais dans la continuité.
On les attendait avec impatience, Mimile, Antoine et Pierrot reprennent enfin du service, et ils sont en pleine forme ! Après avoir défié le patron d’un grand laboratoire pharmaceutique, pourri les meetings de l’UMP à coup de vieux anarchistes incontinents, et lutté pour la sauvegarde des abeilles (en costume !), les « vieux fourneaux » viennent de se trouver un nouveau combat : sauver la magicienne dentelée, une rare espèce de sauterelle dont la présence met en péril le projet de construction d’agrandissement de l’usine de Garan-Servier fils (encore lui !). Le problème, c’est qu’au village on est assez divisé sur la question. Pour certains, le projet du grand labo permettrait de créer de nouveaux emplois et ainsi redynamiser la région en attirant des jeunes. Pour d’autres, il ne s’agit que d’enfumage visant à permettre à l’entreprise de faire encore plus de profits tout en défigurant le paysage et en menaçant la biodiversité. Et ce n’est pas l’arrivée massive de zadites, des écolos militants désireux de préserver l’endroit, qui va aider la petite communauté à retrouver son calme ! D’autant qu’ils sont suivis de peu par le collectif « Ni yeux ni maître » mené par le désopilant Pierrot, parce que, je cite, « c’était l’occasion d’amener tout le monde s’aérer un peu à la cambrousse. L’île de la tordue, c’est choucard comme tout, mais bon, l’été ça chmoute un peu la naphtaline. ». Mais ce quatrième tome est aussi placé sous le signe de la séduction, entre Mimille qui tente de reconquérir sa peu commode Berthe, et Sophie qui fantasme sur le bel entomologiste venu à la rescousse de la sauterelle. On en apprend d’ailleurs enfin un peu plus sur la jeune femme, à commencer par l’identité du père de la petite Juliette !
On retrouve bien évidemment le même humour qui avait déjà fait la réussite des précédents albums, avec des répliques qui font mouche en se moquant de manière plus ou moins acide de l’hypocrisie de certains, de l’intolérance des autres, et de nos petits travers en général. Au fil des pages, les auteurs abordent ainsi le problème des artisans qui ne respectent jamais leurs délais (question de principe !), des complots à la Guimauve Frombze (comprenez « Game of thrones ») fomentés au sein de la fédération de chasse, mais aussi du problème de la désertification des campagnes, du racisme à l’égard des gens du voyage, et même du fameux débat entre « pain au chocolat » et « chocolatine » (même s’il n’y a pas vraiment de débat, on dit pain au chocolat et c’est tout !) Et comme on est chez Lupano, on trouve également une dénonciation des combines des grands patrons pour amasser toujours plus d’argent tout en faisant miroiter aux péquins standards (nous, donc) que ça va créer de l’emploi. Certaines lignes de dialogues sont à mourir de rire (même si on n’atteint pas le niveau des deux premiers tomes), et le fait qu’elles sortent de la bouche de trois vieillards rajoute évidemment un peu plus de piquant. A une dame venue se plaindre que le spectacle de marionnettes de Sophie est une « perversion », tout en s’extasiant sur sa fille, Antoine répondra, par exemple, : « Ce n’est pas ma petite-fille, c’est mon arrière petit-fils, Jean-Moustapha. Il préfère porter des robes. ». Et toc, même la Manif pour tous et ses théories du genre en prennent pour leur grade !
Lupano et Cauuet nous offrent un quatrième tome à la hauteur des précédents, toujours aussi drôle et aussi juste. C’est avec impatience que l’on attend la suite des aventures de Sophie, Pierrot, Mimille et Antoine qui nous promettent encore de sacrés moments de poilade. Un excellent antidépresseur !
Voir aussi : Tome 1 ; Tome 2 ; Tome 3 ; Tome 5 ; Tome 6
Autres critiques : Bianca (Des livres, des livres) ; Stéphane Berducat (L’Accro des bulles) ; Yvan Tilleul (Sin City)