Zapping Ciné : La voie de l’ennemi – Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ? – States of Grace
Comme prévu il y a peu, certaines sorties ciné peu intéressantes ou en redites par rapport à d’autres critiques-ciné déjà formulées sur le site seront ainsi condensées en un Zapping Ciné d’un format évidemment plus court, mais collant forcément à l’actualité des salles obscures. Aujourd’hui, trois films visionnés en ce début de mois de mai, trois contextes contemporains et trois constats radicalement différents. Tentez ou zappez, à vous de choisir !
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La voie de l’ennemi (Two Men in Town)
Synopsis : Garnett, ancien membre d’un gang du Nouveau Mexique vient de passer 18 ans en prison pour meurtre. Avec l’aide d’Emily Smith, agent de probation chargée de sa mise à l’épreuve, il tente de se réinsérer et de reprendre une vie normale. Mais Garnett est vite rattrapé par son passé. Le Sherif Bill Agati veut lui faire payer très cher la mort de son adjoint.
Rachid Bouchareb met en scène Forest Whitaker en piteux taulard en reconversion, entouré du vieux shérif républicain Harvey Keitel, de la convaincante Brenda Blethyn en agent de probation et de Luis Guzman, voix de la tentation. Honnêtement, Forest Whitaker nous a habitués à bien mieux, c’est évident. À côté, la prestation de Brenda Blethyn est magnifique. On comprend bien la détresse de ce repenti qui voit son destin se ré-accomplir et le mystère de la première scène peut être intéressant, mais le choix d’un rythme lent n’excuse pas cet ennui provoqué par des dialogues qui tombent parfois à plat et par la focalisation sur la bêtise des gens qui nous entourent. Car, vraiment, tant le shérif que le caïd mexicain ou quelques autres seconds rôles, la bêtise est chose répandue au point de quitter la cohérence attendue (le discours paternaliste du shérif ou bien la justification des actes du caïd). Les rares belles scènes, notamment avec les personnages féminins, sont perdues dans un flot de plans fixes sans grand intérêt.
Il faut vraiment aimer Forest Whitaker pour ne pas s’ennuyer pendant une bonne partie du film, quelques scènes sauvent parfois la mise.
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Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ?
Synopsis : Claude et Marie Verneuil, issus de la grande bourgeoisie catholique provinciale sont des parents plutôt « vieille France ». Mais ils se sont toujours obligés à faire preuve d’ouverture d’esprit… Les pilules furent cependant bien difficiles à avaler quand leur première fille épousa un musulman, leur seconde un juif et leur troisième un chinois. Leurs espoirs de voir enfin l’une d’elles se marier à l’église se cristallisent donc sur la cadette, qui, alléluia, vient de rencontrer un bon catholique.
Avec un tel pitch original, mais casse-gueule, et forcément parlant à l’aune de toutes les polémiques actuelles, le spectateur attend le scénario au tournant. Eh bien, quelle purge ! Des clichés à tour de bras, mais jamais pour les démonter, au contraire pour les affirmer : l’intérêt est juste que le film tape sur tout le monde, ou presque. Les cathos et leur irrespect total, les noirs et , les rebeus et , les jaunes et leur « petite bite », les juifs, tout le monde il est là et tout le monde en prend pour son grade, certes, mais qu’est-ce que c’est lourd ! C’est censé être une comédie et la première heure ne tire des rires qu’à ceux qui sont habitués aux programmes de TF1. Par la suite, en se penchant très légèrement davantage sur les personnages, on réussit à trouver un ou deux sourires, mais voilà tout. Scénario plan-plan où on devine tout, blagues potaches et encore, et puis surtout une méchanceté à toute épreuve : des sœurs et des beaux-frères qui sabotent le mariage de la quatrième parce que son mari sera noir, c’est recherché ! Les quelques bonnes idées comme montrer des enfants d’immigrés qui réussissent sont illico gâchés par le message qu’il y a derrière. Certains aimeront C. Clavier même s’il ne fait rien ; Pascal N’Zonzi, Noom Diawara et Chantal Lauby ne sont évidemment pas mauvais dans leur registre, mais les dialogues qu’ils ont à déclamer gâchent tout. Après, c’est toujours pareil, il y a qui connaissent leur métier et ceux qui cherchent à en profiter. Comme on dit « certains savent et se taisent, d’autres parlent sans savoir »… Voyez, Elie Sémoun, en trois phrases et deux mimiques, il fait plus que Frédérique Bel, Ary Abittan ou Frédéric Chau cantonnés à des répliques minables dont ils ne sortent rien. Pour autant, sa seule scène de psychologue (et un de mes seuls sourires) est à l’image de bien d’autres gags : elle nécessite au pékin moyen d’être très grossièrement répétée pour devenir lourde… enfin « drôle » selon leurs critères.
À fuir comme la peste donc, tant ça conjugue clichés et conformisme à tous les temps. Par pitié, arrêtez de nous faire des comédies « made in TF1 » où chaque gag est souligné trois fois, non seulement pour faire durer le film, mais surtout pour infantiliser le spectateur : problème pour nous, il en redemande et semble aimer qu’on le prenne pour un con.
Sur le même sujet, au moins on rit plus en 3 minutes que pendant tout ce film :
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States of Grace
Synopsis : Sensible et déterminée, Grace est à la tête d’un foyer pour adolescents en difficulté. Parmi les jeunes membres de son équipe, diversement expérimentés, la solidarité et le bon esprit sont de mise. Jusqu’à l’arrivée soudaine d’une fille tourmentée qui ignore les règles du centre et renvoie Grace à sa propre adolescence… pas si lointaine.
On change complètement d’univers avec cette plongée dans un foyer d’adolescents. Là, au moins, les sentiments paraissent vrais. La douleur et la violence sont bien présentes et les sourires sont d’autant plus forts quand la pression retombe. Ici, c’est l’humain que l’on recherche et tout est fait en ce sens. Les plans sont rapprochés, cadrant au plus près des visages. Les histoires de chacun sont narrées avec de longs silences, des moments empathiques forts et une spécificité pour chacun (poupées pour l’un, rap pour l’autre, via un conte enfantin ou même lors d’un toast en l’honneur de parents adoptifs). Ce n’est jamais facile de ne tomber dans la niaiserie ou dans l’inutilité avec un casting très jeune, mais guidés par Brie Larson et John Gallagher Jr., le trio Kaitlyn Dever, Keith Stanfield et Kevin Hernandez est plutôt poignant. Je ne retrouve pas de scènes inutiles, ni même de dialogues sonnant faux ; peut-être pourra-t-on trouver une mise en lumière trop poussée de certaines violences physiques ou psychologiques, mais cela est compensé par le souci de construction du récit de Destin Cretton : les scènes de début et de fin, en se répondant, encadrent comme il faut le voyage de cette petite Grace qui passe par toutes les états.
Un beau film, bien construit et touchant, dont les quelques maladresses seront forcément compensées par le rapport de chacun à l’enfance qui parlera à tous.
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Carre
Comme vous pouvez le voir, nous sommes en désaccord avec mon cher Dionysos sur le film de Bouchareb, donc impatient de lire vos commentaires !