L’oeil du purgatoire
Titre : L’œil du purgatoire
Auteur : Jacques Spitz
Éditeur : L’Arbre Vengeur
Date de publication : 24 octobre 2008 (1ère édition en 1945)
Synopsis : Vous connaissez le passé, imaginez le futur, redoutez le présent: il vous reste à découvrir le «présent vieilli», ce temps inédit inventé par Jacques Spitz dans un roman phénoménal considéré comme un des classiques du roman d’anticipation français.
Son héros, un peintre raté résolu au suicide, va vivre une expérience hors du commun qui le conduira où nul n’est allé: inoculé par un savant fou, un bacille s’est attaqué à sa vue et lui permet de voir le monde et les êtres tels qu’ils seront dans un futur proche. Mais ce qui n’était qu’une étrange expérience devient une aventure effarante lorsqu’il réalise que le temps se dilate et qu’il «voit» de plus en plus en avant.
Livre haletant sur le cauchemar d’un homme seul au milieu d’un univers en déréliction, L’œil du purgatoire est un roman unique qui réussit à pousser une logique jusqu’à son extrême limite avec une audace et une intelligence qui ont laissé pantois ses admirateurs. Il était impensable de ne pas le proposer de nouveau à ceux qui croient que la littérature, mieux que n’importe quel art, doit nous permettre d’explorer les confins et les mystères de notre imaginaire.
Je suis mort, et il n’y a rien de changé dans l’univers : dirai-je que c’est un peu décevant ?
Comme promis, voici comment j’ai abordé les éditions L’Arbre Vengeur, par l’entremise notamment de la chère Verdorie. Et c’est en complet novice de Jacques Spitz comme de son œuvre que j’attaquais ce court roman au titre énigmatique et mystérieux, L’œil du purgatoire.
Le préfacier indique rapidement que cet auteur français méconnu, qui apparaît malgré tout comme un des pères de la science-fiction surréaliste française (le dernier de cette lignée pourrait ainsi être Alain Damasio), a le talent de faire tenir en peu de mots une foule de sentiments, de situations et de sensations. Comment dire à quel point c’est vrai ?… L’œil du purgatoire est une lente agonie solitaire fondée sur un principe de science-fiction très simple, que je me garderais bien de dévoiler ici car sa découverte est bien plus agréable au fil du roman.
Même s’il ne met pas en scène des personnages hauts en couleurs ou subissant des péripéties épiques, le désespoir monte, inexorablement, la solitude aussi, et on se demande jusqu’où Jacques Spitz va bien pouvoir pousser notre imagination, jusqu’où il va bien pouvoir nous emmener encore, surtout qu’il le fait avec une concision experte. Fortement inspiré par le surréalisme, l’auteur imprègne son roman d’une forte dose de pessimisme, ce qui correspond parfaitement à mon état d’esprit la plupart du temps. La montée d’adrénaline m’a tellement transporté, jusqu’aux frontières de la mort et de la non-éternité, que les derniers paragraphes ont été lus la boule au ventre (l’idée de mort, j’ai toujours trouvé ça intolérable, personnellement ; mon futur beau-papa sera d’accord, je crois…). Mais en tout cas, qu’est-ce que ce roman est bouleversant ! Tellement que, pour une fois, je me passerai de faire une vraie conclusion, mais plutôt un bilan en une phrase. Le caractère irrémédiable de chaque chose en ce bas monde : un sujet bateau, semble-t-il, mais parfaitement traité par un Jacques Spitz surréaliste à souhait qu’il conviendrait de bien mieux mettre en valeur.
Une histoire forte et poignante qui montre que la science-fiction française n’avait pas besoin d’histoires galactiques, robotiques ou informatiques pour nous faire réfléchir sur notre humanité, sur notre vie qui ne vaut rien et sur la profondeur du temps. L’Arbre Vengeur met, de plus, largement l’auteur et son œuvre en valeur, tous deux ayant bien besoin d’être de nouveau reconnus comme des maîtres en leur genre.
Autres critiques : Lorhkan (Lorhkan et les mauvais genres)
Aucun commentaire
Theodora verbunt
En lisant votre très belle chronique, Dionysos…je plonge une deuxième fois dans ce monde entrevu par l’œil du purgatoire…
Dionysos
Merci, c’est très gentil. C’est toujours compliqué de faire revivre d’aussi belles découvertes littéraires.