Fantasy

Uter Pandragon

Titre : Uter Pandragon
Auteur : Thomas Spok
Éditeur : Aux forges de Vulcain / Folio SF
Date de publication : 2018 / 2020

Synopsis : Vortigern l’usurpateur règne sur la Bretagne depuis la mort du roi Constant. Mais Uter et Pandragon, les fils de ce dernier, rentrent d’exil, prêts à tout pour reconquérir le trône qui leur revient légitimement. Pandragon est un meneur d’hommes qui croit en son bon droit. Uter est un guerrier, mû par la vengeance. Peu à peu s’enchaînent batailles et victoires, mais une ombre plane sur leurs aventures, celle de Merlin et d’une mystérieuse petite fille. Uter et Pandragon sont-ils maîtres de leur existence ou les jouets de puissances obscures et merveilleuses ?

Deux frères en quête de vengeance

En 2018, Thomas Spok publiait son premier roman chez les éditions Aux forges de Vulcain et, à l’époque, j’étais complètement passée à côté de cette parution. L’oubli est désormais réparé (l’ouvrage étant depuis sorti en poche chez Folio SF) et m’a permis de me replonger dans un mythe dont j’avais pendant longtemps dévoré toutes les variations, avant finalement de me lasser : je veux bien évidemment parler de la légende arthurienne. Ou plutôt post-arthurienne, dans le cas présent, puisque le roman met en scène le père du célèbre roi de Bretagne, Uter. L’histoire commence alors que le frère aînée d’Uter, fils du roi Constant ayant depuis peu accédé au trône, est assassiné alors que son armée vient de repousser une nouvelle invasion. Vortigern, conseiller du précédent roi et apprécié des seigneurs bretons pour son courage, usurpe alors la couronne, tandis qu’un fidèle de l’éphémère souverain s’empresse de quitter l’île de Bretagne pour mettre les frères de ce dernier à l’abri d’un potentiel assassinat. Bien des années plus tard, le mécontentement d’une poignée de Bretons les incitent à traverser la mer et à retrouver les autres fils de Constant pour leur proposer la couronne. Pandragon étant le plus âgé, c’est naturellement vers lui que tous se tournent, mais le plus jeune, Uter, se trouve entraîné à sa suite, de même qu’un autre jeune homme soucieux de préserver son anonymat mais qu’on reconnaît aisément comme étant Merlin. Ensemble, ils vont se lancer dans une quête folle pour trouver une armée et reprendre la couronne à l’usurpateur qui sombre de plus en plus dans la folie et tyrannise ses sujets dont il entend qu’ils mènent à bien un projet grandiose mais irréalisable.

Belle réécriture mais personnages décevants

Thomas Spok reprend une partie des éléments emblématiques de la légende arthurienne, à commencer par les personnages de Merlin et Uter, mais fonde aussi son récit sur des aspects plus historiques tels que la montée de l’influence du christianisme en Occident ou encore la multiplication des invasions dites « barbares » qui touchent notamment la Grande-Bretagne. L’auteur fait également appel au folklore, n’hésitant pas à mettre en scène des personnages appartenant au « petit peuple » légendaire de Bretagne lorsque le récit se focalise sur le point de vue de Merlin qui a évidemment des liens étroits avec le surnaturel. L’intrigue est bien construite, le sujet intéressant et la plume de l’auteur très agréable, et pourtant je ne suis pas parvenue à vraiment me passionner pour l’histoire de ces deux frères en quête de vengeance. La faute, notamment, aux personnages qui manquent de consistance et de chair. Uter, notamment, déborde d’émotions (essentiellement de la colère) et pourtant on ne parvient pas à éprouver une quelconque empathie pour cet homme bouillonnant et tourmenté mais difficile à cerner et, disons-le, souvent très désagréable. La façon dont le personnage considère les femmes y est sans doute pour quelque chose, le jeune homme sexualisant à outrance toutes celles qui passent à sa portée et ne semblant voir en elles que de simples objets de plaisir. A ce propos, j’ai également été déçue de ne pas voir de personnages féminins davantage mis en avant. Certes, il y en a quelques unes (l’intrigante Morgause et la reine Ronwen, de loin les personnages les plus prometteurs) et l’auteur pointe même à plusieurs reprises le traitement injuste qui leur ai fait, mais elles restent toujours au second plan, et leurs actions n’ont que peu d’impact sur le déroulement du récit.

Dans « Uter Pandragon », Thomas Spok propose une réinterprétation moderne de l’histoire du père d’Arthur et nous replonge efficacement dans la matière de Bretagne qu’il ressuscite avec talent. Les personnages ne sont malheureusement pas à la hauteur et peinent à émouvoir (voir s’avèrent franchement désagréable comme c’est le cas du héros), tandis que la relégation au second plan des personnages féminins (pourtant bien mieux campées que leurs homologues masculins) nuit au récit.

Autres critiques :  ?

Passionnée d'histoire (surtout le XIXe siècle) et grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement) mais aussi d'essais politiques et de recherches historiques. Ancrée très à gauche. Féministe.

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