Neighian, tome 2
Titre : Neighian, tome 2
Cycle/Série : Neighian
Auteur/Autrice : Louise Jouveshomme
Éditeur : Mnémos
Date de publication : 2023 (septembre)
Synopsis : Une nouvelle aube se lève pour Heltia de Cytari, tandis que le Continent secoue sa torpeur. Réfugiée à la cour de Breniam en tant qu’Hippolyte de Carnaïm, héritière royale, la Neighian pèse ses options. Toutes sont fragiles, pavées d’intrigues et d’affrontements sans grâce ni retour. D’un côté, se résigner et vivre avec sa colère, de l’autre crier vengeance, pour le Continent, pour les yeux de Melion, pour elle-même. A-t-elle encore le choix ? Pendant ce temps, le Nouvel Ordre continue de bouleverser le Continent, après le coup d’État qui a jeté bas le Conseil de l’Union. À sa tête, un poète et un meneur immortel, deux idéalistes radicaux qui oeuvrent pour un monde neuf. Entre Hippolyte de Carnaïm, éclatante championne qui se lève à l’Est, et le nouveau départ promis par le Nouvel Ordre, où ira désormais l’allégeance des peuples ?
…
Une conclusion dans la droite lignée du tome précédent
En février dernier paraissait le premier tome de « Neighian », début d’un diptyque écrit par une jeune autrice faisant son apparition sur la scène de l’imaginaire français, Louise Jouveshomme. Sept mois plus tard, le deuxième et dernier volume vient de sortir, et on y retrouve les mêmes défauts et qualités qu’on avait pu observer précédemment. [Attention aux SPOILERS: si vous n’avez pas eu l’occasion de lire le premier opus, je vous conseille de sauter directement au paragraphe suivant.] L’action prend place quelques semaines seulement après le double coup de théâtre ayant ébranlé le continent, à savoir la prise de pouvoir du Nouvel Ordre ainsi que l’annonce de la véritable identité de l’héroïne qui ne serait pas juste une guerrière lambda mais en réalité l’héritière de la couronne du royaume de Carnaïm. Furieuse de ne pas avoir su déchiffrer les intentions de son mentor et d’avoir cru à l’utilité de la mission diplomatique qu’on lui avait confié aux côtés du représentant des elfes, la guerrière est bien décidée à contrer l’influence du nouveau Conseil. Ce dernier s’apprête justement à remettre en cause les fondements mêmes de la société continentale en révélant l’origine des Pervertis, ces créatures corrompues qui sèment la terreur sur les routes depuis des siècles. Or Heltia compte pour sa part jouer de l’aura que lui confère sa nouvelle réputation de Héraut des Fées, aura justement liée à sa capacité à débarrasser le royaume des Pervertis. Ce deuxième tome se révèle ainsi être la concrétisation de l’affrontement entre deux visions mais aussi entre deux personnages, l’élève et son mentor, qui jouent l’un comme l’autre un jeu dangereux capable de remettre en cause la stabilité du continent et la pérennité de la paix entre les différents peuples, à commencer par celle des elfes et des loups. Là où le premier tome empruntait plutôt au registre de la quête, avec cette mission diplomatique secrète menée par un duo réunissant deux personnalités totalement dissemblables, ce deuxième opus fait clairement la part belle aux intrigues de cour et aux grandes manœuvres politiques. De guerrière appartenant à un ordre d’élite et ayant l’habitude de vagabonder d’un bout à l’autre du continent, voilà notre héroïne devenue princesse, avec tout ce que cela implique en terme de protocole, d’entourage et surtout de duplicité. Or, Helita cache un lourd secret et un passé qui se marient tous les deux très mal à la vie de cour.
Un diptyque prometteur mais plombé par trop de longueurs
Le deuxième volume de « Neighian » se situe dans la droite continuité du premier si bien qu’on y retrouve aussi bien la promesse de scènes passionnantes et de coups de théâtre astucieux, qu’un côté un peu fastidieux, avec des longueurs à n’en plus finir qui viennent gâcher le plaisir de lecture. Tout comme le premier, ce tome-ci aurait mérité un sacré écrémage de plusieurs centaines de pages, ce qui l’aurait sans doute rendu plus digeste. L’autrice se perd en effet toujours dans des descriptions à rallonge qui n’apportent rien ni à l’immersion ni à la compréhension mais qui font s’étirer inutilement les scènes jusqu’à leur retirer une partie de leur intensité. Une partie seulement car, en dépit de ces passages longs et souvent inutiles, l’intrigue se révèle passionnante et tout à fait capable de captiver le lecteur. L’histoire concoctée ici par Louise Jouveshomme est en effet de très bonne facture et possède une richesse et une complexité qui feront le bonheur des amateurs d’intrigues politiques en fantasy. Ça se trahit, ça s’écharpe, ça multiplie les coups bas… : la cour de Carnaïm est un véritable panier de crabes que l’arrivée d’Heltia va venir sacrément secouer, modifiant les rapports de force entre les différentes factions qui s’affrontent pour le pouvoir. Cet aspect là du récit est immersif et dévoile le potentiel plus que prometteur de l’autrice en matière de construction narrative. Bien que réussi, le fond finit malgré tout par pâtir de la forme qui, elle, ne parvient pas à convaincre. Outre les longueurs, on peut également mentionner l’absence déstabilisante de phrases négatives correctement construites (les « ne » sont systématiquement supprimés) non pas seulement dans les dialogues pour signifier un registre de langage familier, mais directement dans la narration. On a donc des phrases très bien construites, avec un vocabulaire et une syntaxe d’un niveau plutôt soutenu, et puis brusquement une phrase négative bancale qui vient trancher avec la qualité de la plume utilisée jusque là. Les personnage sont quant à eux en demi-teintes, avec là encore des profils intéressants mais trop en retrait par rapport à Heltia qui occupe la majorité de la scène. Or cette dernière n’est pas une héroïne particulièrement attachante : trop froide, trop dure, et surtout trop isolée pour tisser avec les autres personnages de véritables relations qui nous la dévoileraient sous un autre jour (son lien avec l’elfe qui l’accompagnait dans le premier tome est par exemple intéressant mais largement sous exploité).
Avec son diptyque « Neighian », Louise Jouveshomme fait une arrivée remarquée en fantasy grâce à deux romans pleins de potentiel, à la fois en matière de création d’univers mais aussi et surtout de construction narrative, le deuxième tome étant marqué par une succession d’intrigues politiques assez juteuses. L’œuvre souffre toutefois de quelques travers, à commencer par des longueurs qui rendent parfois la lecture interminable et ôte son charme à des scènes pourtant prometteuses. On peut également mentionner au nombre des bémols des personnages soignés mais auxquels on s’identifie peu, ainsi que certaines maladresses au niveau du style, et ce en dépit d’une plume par ailleurs agréable et efficace. Avis mitigé donc, mais je suivrai avec attention les prochaines parutions de l’autrice.
Voir aussi : Tome 1
Autres critiques : ?
2 commentaires
L'ours inculte
J’ai eu le même ressenti sur le premier, donc si le 2 est pareil je vais passer mon tour je crois. C’est dommage mais effectivement c’est prometteur
Boudicca
Oui j’ai vu ça 😉 C’est vrai que c’est dommage, il y a malgré tout pleins de bonnes choses dans ce diptyque.