Jeunesse - Young Adult

008 Apprenti espion, tome 1

008 Apprenti espion 1

Titre : 008 Apprenti espion, tome 1
Cycle/Série : 008 Apprenti espion, tome 1
Auteur : Shun Matsuena
Éditeur : Kurokawa [site officiel]
Date de publication : 12 mai 2021 (2018 en VO)

Synopsis : Jeune lycéen sans établissement, Eight est désespéré…
Jusqu’au jour où il reçoit la lettre d’un lycée auquel il n’avait pas postulé ! Ravi de pouvoir enfin vivre une vie d’adolescent lambda, il est loin de se douter qu’il est en train d’intégrer un lieu de formation pour agents secrets ! Entouré par des élèves déjà aguerris ainsi que par des professeurs tous agents secrets d’élite en activité, Eight doit passer des tests redoutables qui s’enchaînent sans interruption ! Sa nouvelle vie de lycéen très agitée commence dans un monde qui lui est totalement inconnu !!

Quand il arrive quelque part, un agent secret vérifie toujours la configuration des lieux et les possibilités de fuite.

Grâce aux éditions Kurokawa, je me suis remis dans un shônen qui débute en France en 2021, en l’occurrence 008 Apprenti espion, de Shun Matsuena !


Initiation à l’espionnage

Eight Akashi est un adolescent japonais victime d’une espèce de Parcoursup pour lycées, puisqu’aucune de ses candidatures n’a été retenue ! Orphelin de père, mais très entouré par sa mère et ses deux frères et sœurs, il reçoit en dernier ressort une invitation au lycée national de Nakano, alors qu’il n’y avait pas du tout postulé (évidemment, puisqu’il ne le connaît même pas). Il s’y rend tout de même, en désespoir de cause, et découvre qu’il s’agit d’une école secrète qui enseigne l’espionnage. Tout étonné, et même affolé par toutes ces révélations, il est tout de même guidé par Ayame Kido, qui semble très au fait des règles en vigueur dans cet établissement si particulier et, apparemment, si élitiste. Un dilemme s’impose donc à lui : refuser cette inscription et ne pas savoir de quoi son avenir sera fait ou bien accepter la proposition de formation au métier d’espion et se faire franchement violence…

Un scénario immersif

Le système éducatif japonais est connu pour ses multiples niveaux de sélection, créant une intense concurrence entre citoyens et le stress social qui va avec. Ici, Eight doit avoir une quinzaine d’années et côté immersion, cela ne démarre pas trop mal, puisque le lecteur est confronté à des enjeux scolaires qui se développent de plus en plus en France avec les contre-réformes néolibérales sur le collège, le lycée et le baccalauréat. Ici, il y adonc un intérêt sur l’enjeu social considérable en lequel consiste la réussite scolaire dès l’équivalent de notre collège : « l’orientation » est devenue la seule variable d’ajustement, heureusement que nous ne sommes pas du tout sur cette voie-là en France depuis de nombreuses années. Face à cette sélection drastique, le scénario s’appuie sur l’éternel tropisme du héros-héritier qui accède à un destin particulier uniquement parce qu’il y ait prédestiné par son ascendance ; toutefois, l’adolescent est bien écrit comme un ado : ses réactions ne sont pas forcément les plus cohérentes au premier abord, on pourrait même dire que la logique est oublié si d’autres priorités adolescentes surviennent. Ainsi, l’humour est bien présent dans ces premiers chapitres, avec ces moments de décalage où un personnage est caricaturé dans une réaction déjantée, ce qui nourrit un certain second degré. Ce décalage se constate aussi dans l’enchaînement des premiers chapitres, qui donne parfois l’impression d’appuyer chaque épisode sur un style différent (épisode d’initiation, épisode de romance, épisode d’action, etc.). En tout cas, on a envie de lire la suite, notamment (enfin) quelques missions d’espionnage puisque cela s’appelle « 008 », on veut de l’espionnage, du vrai ! Dans ce premier tome, tous les ingrédients sont mis en place pour de sérieux drames à venir : des collègues aguerris qui sont autant de concurrents, des idylles naissantes, des mystères qui planent sur la direction de l’établissement, ainsi que le profil d’Ayame Kido et sur la destinée manifeste du héros.

Du conservatisme social et sociétal

Toutefois, assez vite, un certain nombre de réflexes liés au genre shônen prennent le dessus : personnellement, cela fait bizarre mais plaisir de relire du shônen, mais c’est assez triste aussi d’y retrouver une vision aussi conservatrice sans contrepoint ni allusion aux mouvements sociétaux de ces dernières années. Dès la couverture et régulièrement dans ces premiers chapitres, nous assistons à la sempiternelle contre-plongée sur une jeune femme à poitrine bonnet G avec dos cambré, jupette d’écolière et culotte apparente : Ayame Kido est le seul personnage féminin et adopte toutes les positions et scènes classiques d’un manga sexiste puisqu’en premier lieu, elle ne se positionne que vis-à-vis des personnages masculins ; c’est donc juste gênant de voir que chaque choix scénaristique concernant Ayame Kido est constamment sexiste. Cela peut rester de l’ordre du stéréotype persistant (à l’image des « pin-up girls » anglo-saxonnes) lors des cinq premiers chapitres ; toutefois, le sixième chapitre bat tous les records avec une scène de femmes nues totalement gratuite, résumée par l’assertion d’un collègue masculin : « la beauté fait partie de l’arsenal des agents féminins »… Voilà, voilà. Après, bien sûr, tout cela intervient dans un cadre qui est globalement conservateur avec une société uniformisée, particulièrement contraignante sur les corps et les esprits (avec le directeur Araragi comme prototype du directeur autoritaire, voire totalitaire), vision sociétale qui est peut-être bien celle du Japon contemporain, je ne saurais le dire.

C’est toujours intéressant de débuter une nouvelle série ; ici, 008 Apprenti espion propose un scénario immersif, mais dans lequel il faut faire abstraction de toutes les allusions conservatrices qui parsèment le récit.

Voir aussi :
Tome 2 ; Tome 3

Autres critiques :

Kaamelotien de souche et apprenti médiéviste, tentant de naviguer entre bandes dessinées, essais historiques, littératures de l’imaginaire et quelques incursions vers de la littérature plus contemporaine. Membre fondateur du Bibliocosme.

2 commentaires

  • belette2911

    La couverture était déjà fort explicite ! Les mangas ont des codes et ils n’y dérogent pas tous, ce qui devient lassant, à force.

    Les femmes/filles plantureuses à l’excès, ça devient de plus en plus lourd, mais aussi la gestuelle des personnages, quand ils sont heureux (on le voit dans la scène où il se met à courir). Un peu de renouveau ne ferait pas de tort.

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