Fiction historique

L’armée des Veilleurs, tome 2 : Les forêts combattantes

Titre : Les forêts combattantes
Cycle/Série : L’armée des veilleurs, tome 2
Auteur : Jérôme Nédélec
Éditeur : Stéphane Batigne (Tri Nox)
Date de publication : 2019

Synopsis : 890 en Bretagne. Alors que les Bretons ont réussi à repousser les Vikings sur les rives de la Visnonia, un nouveau danger menace l’unification du royaume. Missionné par le comte Alan, un groupe de guerriers s’enfonce dans la profonde forêt de Brocéliande. Leur objectif : retrouver un mystérieux forgeron détenteur de secrets métallurgiques capables de leur donner l’ascendant sur leurs ennemis. Mais rien ne se passe comme prévu et leur périple les amène à combattre de terribles adversaires, en écho aux révélations prophétiques du moine Fidweten, témoin d’évènements effroyables survenus soixante ans auparavant.

 

Le mariage réussi de la fantasy et de l’histoire

890 après J.-C. Bretagne. Après sa victoire contre les armées vikings, Alan est désormais en position de force pour asseoir son autorité sur toute la Bretagne. L’unification du royaume reste toutefois fragile, la suprématie du comte étant toujours contestée par une poignée de seigneurs plus ou moins puissants. L’un d’entre eux, en particulier, pourrait bien avoir gardé dans sa manche un atout à même de faire pencher la balance du côté des rebelles. C’est pour contrecarrer les plans du félon que notre héros, tout juste remis de la bataille de Questembert, est envoyé dans la forêt de Brocéliande en compagnie d’une petite troupe. Leur mission ? Trouver l’emplacement de la forge secrète dissimulée par les ennemis du comte et convaincre le forgeron, artisan de génie capable de créer des armes d’une efficacité redoutable, de passer de leur côté. Les choses ne vont, évidemment, pas se passer tout à fait comme prévu… J’avais découvert le premier tome de « L’armée des veilleurs » totalement par hasard, après que Jérôme Nédélec nous ait contacté pour lire son roman, et j’avais été agréablement surprise par la qualité de l’ouvrage. L’auteur ayant eu la gentillesse de nous faire parvenir la suite, c’est avec plaisir que je me suis replongée dans cette Bretagne médiévale bouleversée par des jeux d’alliances et dans laquelle des forces surnaturelles sont également en mouvement. Sans surprise, le second volume se révèle d’aussi bonne facture que le premier. Cette fois encore, deux narrateurs se disputent l’attention du lecteur : le héros du premier tome, un combattant au service d’Allan envoyé en mission dans Brocéliande, et un jeune moine ayant vécu plusieurs décennies plus tôt qui voit sa vie bouleversée par sa rencontre avec un ermite charismatique retranché dans la forêt. Le lien entre les deux histoires est, dans un premier temps, très ténu, mais il se renforce au fur et à mesure du roman. Ainsi, quand bien même on peine d’abord à s’intéresser autant à l’histoire du moine qu’à celle du soldat (héros du premier tome), on finit rapidement par se prendre au jeu et par éprouver autant de frustration en quittant l’un ou l’autre.

Brocéliande, lieu propice au mystère

Une fois passée la brève phase d’introduction visant à présenter les enjeux et les nouveaux personnages, il devient difficile de lâcher le roman. L’auteur possède un bon sens du rythme, de même qu’un sacré sens du coup de théâtre puisque les révélations s’enchaînent sans qu’on puisse les voir venir. Impossible de s’ennuyer, donc. Le surnaturel occupe pour sa part une place beaucoup plus importante ici que dans le premier tome, notamment dans les chapitres consacrés au parcours du moine qui mettent en scène une créature bien connue des littératures de l’imaginaire : le mort-vivant. Or, si les zombies sont à la mode depuis quelques années, il est en revanche assez rare de les voir mis en scène à une période historique autre que la notre, ce qui apporte une touche d’originalité bienvenue au roman. L’auteur a, de plus, l’intelligence de ne pas faire dans la surenchère et parvient efficacement à retranscrire l’effroi des personnages confrontés au phénomène sans tomber dans le « gore pour faire gore ». La reconstitution historique, elle, est toujours aussi convaincante car le peu d’informations que l’on dispose concernant le contexte général de l’époque est compensé par les nombreuses précisions consacrées au mode de vie, à l’armement ou aux rapports de domination entre les individus. L’immersion du lecteur est aussi renforcée grâce au vocabulaire utilisé, précis juste ce qu’il faut sans jamais nuire à la fluidité du texte par des termes trop techniques ou trop abscons. Cette immersion atteint son comble au cours des scènes de combat qui sont particulièrement bien rendues grâce à un petit côté épique qui ne vient néanmoins jamais occulter la violence et la dureté des affrontements. Les personnages sont eux aussi convaincants, la plupart étant doté d’un sacré bagou, à commencer par le héros qui se révèle toujours aussi attachant. Bien que les milieux dans lesquels évoluent les deux narrateurs (l’armée et la religion) laissent peu de place aux femmes, l’auteur ne les oublie pas pour autant et, si elles sont moins nombreuses que les hommes, leur parcours et leur personnalité sont détaillés avec soin.

« Les forêts combattantes », deuxième volet de « L’armée des veilleurs », est un roman de bonne facture qui mêle habilement histoire et surnaturel. Grâce à un style agréable et une intrigue bien ficelée, ce second opus parvient à capter l’intérêt du lecteur du début à la fin. C’est avec plaisir que je lirais la suite de cette histoire dont je suis curieuse de connaître le dénouement.

Voir aussi : Tome 1 ; Tome 3

Autres critiques : Célindanaé (Au pays des cave trolls) ; L’ours inculte

Passionnée d'histoire (surtout le XIXe siècle) et grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement) mais aussi d'essais politiques et de recherches historiques. Ancrée très à gauche. Féministe.

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