Bohème
Titre : Bohème
Auteur : Mathieu Gaborit
Éditeur : Mnémos / Folio SF
Date de publication : 2010 / 2015
Synopsis : Après la révolution industrielle, l’Europe a été submergée par une substance étrange et dangereuse, l’écryme. Reliées par le fragile réseau des traverses d’acier, seules quelques cités gouvernées par l’aristocratie capitaliste émergent dans cette mer corrosive. Mais sous le joug de la propagande, la révolte gronde… Quand un dirigeable porteur d’une précieuse cargaison clandestine s’échoue dans l’écryme, c’est Louise Kechelev, avocate-duelliste et fille de révolutionnaires praguois, qui est chargée de récupérer la cargaison… Pour elle, c’est le début d’un voyage sans retour aux confins des traverses, où se murmure le nom d’une cité perdue : Bohème.
Son regard glissa sur l’écryme. Une immensité hostile, une mer visqueuse et létale. Sa couleur variait du brun au vert en fonction des saisons et de la luminosité. Parfois, Léon parvenait à apprécier le spectacle, surtout au lever du jour lorsque les premières lueurs de l’aube se réfractaient à la surface. Une considération intime qui pouvait théoriquement lui valoir une mise à pied par la commission psychiatrique. Pour ses soldats et l’immense majorité de ses contemporains, l’écryme incarnait la mort.
Après l’excellente « Trilogie de la lune » de Johan Héliot, j’ai décidé de poursuivre ma découverte du « steampunk à la française » avec Mathieu Gaborit qui nous dépeint dans « Bohème » une Europe du XIXe siècle uchronique. Imaginez que la révolution industrielle ait été considérablement freinée par l’apparition sur tout le territoire d’une mystérieuse substance toxique baptisée écryme. Imaginez maintenant que seules quelques cités n’aient pas été englouties et soient reliées les unes avec les autres par un fragile réseau ferroviaire et aérien. Imaginez enfin que la stabilité de ces îlots soient remis en question par l’essor d’un mouvement révolutionnaire bien décidé à renverser les régimes autoritaires en place. Avouez que le décor a de quoi titiller la curiosité ! Ne manque plus à l’ensemble qu’un protagoniste suffisamment charismatique et bien campé pour s’intégrer dans un cadre tel que celui-ci. Ce personnage, c’est Louise Kechelev, avocate duelliste au caractère affirmé a qui on confie la périlleuse mission de récupérer la cargaison d’un dirigeable appartenant à sa famille et s’étant échoué dans l’écryme. La besogne n’est évidemment pas si simple, notre héroïne ne tardant pas à se retrouver entraînée dans un conflit beaucoup plus vaste opposant les révolutionnaires à la Propagande et qui lui permettra d’enfin percer les mystères de l’écryme.
Vous l’aurez sûrement déjà compris, Mathieu Gaborit ne manque pas de bonnes idées et nous dépeint ici un monde post-apo teinté de steampunk d’une richesse extraordinaire (univers qui sera d’ailleurs repris et développé dans le jeu de rôle « Ecryme »). Là où le bât blesse, c’est au niveau de l’intrigue qui se révèle bien trop décousue et qui aurait sans doute méritée d’être davantage étoffée. La première partie, « Les Rives d’Antipolie », relatant l’enquête de Louise du côté de l’Europe de l’Est se tient plutôt bien : l’auteur pose les bases de son intrigue tout en s’attardant sur certaines spécificités de son univers sans pour autant que cela nuise à la narration. La seconde partie, « Révolutsya », est plus problématique car si l’idée qui y est développée est véritablement passionnante, l’intrigue part en revanche dans tout les sens, comme si l’auteur s’était rendu compte un peu tardivement qu’il allait falloir rassembler tous les fils avant de conclure pour que le récit garde une certaine cohérence. C’est dommage, car encore une fois la plupart des concepts développés ici ne manquent pas d’originalité, de même que certaines des thématiques qui sont abordées avec beaucoup de finesse. La plume de l’auteur est quant à elle toujours aussi plaisante et soignée, donnant lieu à des passages mémorables desquels se dégagent une grande poésie.
En dépit d’une narration trop confuse et d’une conclusion peu satisfaisante, « Bohème » dispose de suffisamment d’atouts pour séduire le lecteur, qu’il soit amateur de steampunk ou non. Un roman qui mérite le détour, aussi bien pour la qualité de la plume de l’auteur que pour la singularité de son univers.
Critique réalisée dans le cadre du Challenge Francofou 4
Aucun commentaire
Apophis
Très bonne critique, qui me donne envie de me replonger dans cet univers. Par contre, le Jeu de rôle est plus ancien (1994) que les romans, et ce sont donc eux qui sont inspirés par le jeu, pas l’inverse.
Boudicca
Autant pour moi et merci pour la rectification, j’avais mal compris 🙂
aupaysdescavetrolls
Je ne garde pas un bon souvenir de ce roman. J’avais bien aimé le début avec la description de l’univers et le personnage de Louise. Mais après, c’était très confus et long. J’ai eu du mal à le finir. L’univers est vraiment intéressant et j’aurai bien aimé jouer au jeu de rôle mais franchement le roman aurait du être réduit à la première partie.
Boudicca
La seconde partie est clairement la plus bancale mais j’ai bien aimé l’idée de ces artistes capables de donner vie à leurs créatures. Le jeu de rôle me tente aussi du coup ^^
Aelinel Ymladris
J’allais mettre ce roman dans ma wish list (j’adore le steampunk) mais la narration confuse et la conclusion en demi-teinte me gènent…
Boudicca
Ah mince je ne voulais pas dissuader ! J’ai apprécié ma lecture malgré tout (et puis le roman est assez court^^)