Le roi d’ébène
Titre : Le roi d’ébène
Auteur : Christine Cardot
Éditeur : Mnémos
Date de publication : 2010
Synopsis : Le Ratel : c’est le surnom de la Sentinelle Kaïrale. Comme ce petit carnivore africain, elle n’a peur de rien et ne lâche jamais sa proie quant il s’agit de résoudre les intrigues criminelles qui menacent son pays, l’Arrassanie. Quand El Phâ, le Roi dÉbène, entend faire d’elle son Second Regard Clair, la jeune femme croit à une mauvaise blague : être conseiller du souverain demande des compétences qui ne sont pas les siennes. Pourtant, dès sa première mission, elle découvre que sa nomination relève d’une trame politique complexe à laquelle elle est liée, sans le savoir, depuis son plus jeune âge. Le Roi dÉbène a tout du conte africain : la magie des sorciers, les animaux qui hantent les esprits comme les savanes et les bords du grand fleuve…
Je garde la douleur, elle demeure mon bien,
Quand elle résonne en moi, c’est encore de toi.
Puisque je t’ai perdue, pour le seul, l’éternel,
Je ferai de l’absence mon « nous » perpétuel.
Un décor évoquant le continent africain, une héroïne au caractère bien trempée, des intrigues de cour, de la magie… : aucun doute, « Le roi d’ébène » possède toutes les qualités requises pour séduire les amateurs d’une fantasy sortant quelque peu des sentiers battus. Et pourtant je ressors de cette lecture avec un sentiment très mitigé.
Je ne cacherais pas avoir éprouvé quelques difficultés à rentrer dans l’histoire, le début se révélant un peu brouillon au point qu’il m’a fallu attendre le dernier tiers du roman pour me faire enfin happer par le récit. Certaines scènes valent cela dit le détour, notamment le « voyage spirituel » entrepris par l’héroïne au côté des animaux sauvages peuplant le royaume d’Arrassanie, curieusement envoûtant et très marquant. La fin est également plutôt réussie et permet de refermer l’ouvrage sur une note plus positive liée à un retournement de situation de dernière minute. Là où le roman se fait surtout décevant, c’est en ce qui concerne l’ambiance qui manque curieusement d’exotisme. Les ouvrages de fantasy consacrés à la culture africaine ne sont pas légion, et celle-ci se fait plutôt discrète ici, si n’est à travers l’omniprésence du monde animal ou encore la mention de quelques éléments originaux tels ces différents clans guerriers aux scarifications ou peintures rituelles particulières. Si vous cherchez un roman imprégné des traditions du continent noir, je serais ainsi plutôt tenté de vous conseiller l’excellent « Qui a peur de la mort ? » de l’auteur nigérienne Nnedi Okorafor qui, pour le coup, s’inspire en profondeur de l’Afrique et de sa culture.
Kaïrale est pour sa part un protagoniste difficile à cerner (voire légèrement antipathique au début) et, si on en vient à s’intéresser un peu plus à son sort à mesure que l’on comprend mieux ses motivations, ce n’est jamais au point de véritablement se prendre d’affection pour elle. L’auteur reste trop sibylline concernant le passé de son héroïne à propos duquel il aurait été bon d’avoir d’avantage de renseignements : sa relation avec son mentor, son enfance, sa vie au sein des Sentinelles… La plupart de ces événements sont simplement évoqués, sans que l’on s’y attarde outre mesure, ce qui ne fait que renforcer la frustration du lecteur à l’égard de la jeune femme. Les personnages secondaires peinent également à se démarquer, certains restant bien trop en retrait tandis que la présence d’autres s’intègrent de façon maladroite au récit. Quant au duo Gel Ram / Kaïrale sur lequel se base l’essentiel de l’ouvrage, il manque malheureusement d’alchimie si bien que l’on se lasse rapidement de leurs petites chamailleries qui n’apportent au final pas grand chose à l’histoire. Autre source d’agacement : leur propension à ne s’exprimer qu’en « grommelant » ou « râlant » à chaque dialogue qui n’aide guère à envisager les personnages sous un jour plus favorable.
« Le roi d’ébène » avait tout pour plaire et si la lecture se révèle la plupart du temps divertissante, la magie peine malheureusement à opérer. S’il serait exagéré de parler de déception, je doute cela dit de garder un souvenir impérissable de ce roman. Dommage, car certaines idées de l’auteur auraient mérité d’être davantage exploitées.