Chevalier Brayard
Titre : Chevalier Brayard
Scénariste: Zidrou
Dessinateur: Francis Porcel
Éditeur : Dargaud
Date de publication : 1er septembre 2017
Synopsis : Le seigneur Brayard s’en revient de croisade, accompagné du jeune moine Rignomer. Sur leur chemin, ils croisent la route d’une adolescente, la princesse Hadiyatallah, qui se révèle être une otage en fuite. Brayard n’hésite pas un seul instant : il décide d’escorter la princesse en Orient pour la rendre à son père en échange d’une rançon, et entraîne Rignomer dans l’aventure. C’est le début d’un voyage qui s’annonce particulièrement rocambolesque…
– Fameux potager que j’ai engendré là !
– Au moins, tu as la certitude que c’est bien toi qui a semé cette verdure ? Quoique ! Tu ne trouves pas que ton frère et ta femme s’entendent « un peu trop bien » ? Tu sais ce que l’on dit des manchots! […] Ne crains-tu pas que, profitant de ta longue absence,
Geoffroy n’ait mis la main qui lui reste sur la clé de la ceinture de chasteté de ton épouse ?
– Je ne le crains pas ! J’en ai l’intime conviction ! C’est à lui que j’avais confié la clé en question. Tant que ça reste dans la famille,
hein !
Décidément sur tous les fronts, Zidrou n’en finit pas d’écrire sur des sujets plus variés les uns que les autres, qui plus est avec succès. Cette fois, le scénariste belge, accompagné du dessinateur espagnol Francis Porcel, nous emmène en balade à cheval au temps des croisades dans un périple haut en couleurs, avec pas mal de rouge notamment. Sang, le rouge.
Comme lors de leur précédente coopération, l’époque médiévale reçoit donc les faveurs des auteurs. Le chevalier Brayard revient de sa deuxième croisade pour tenter de reprendre Jérusalem et le tombeau du Christ, mais aussi et surtout pour découper de l’infidèle à tour de bras. Il ressasse sur tout le chemin du retour des couplets de son invention pour mieux célébrer ses prouesses, pas toutes réalisées sur le champ de bataille. Accompagné du jeune moine Rignomer, tout fier de ramener des reliques de la sainte locale, les deux hommes parviennent enfin en vue du fief du chevalier Brayard. Ils font là l’improbable rencontre de la princesse arabe Hadiyatallah, qui vient d’échapper au seigneur qui la tient en otage. Se rappelant bien vite les raisons qui l’avaient encouragé à partir en croisade, Brayard se fait fort de ramener la princesse à Antioche contre la rançon promise par le père de la donzelle, pourvu que celle-ci arrive indemne au bercail.
Le scénario de Chevalier Brayard est, il ne faut pas s’en cacher, fort improbable et par trop cousu de fil blanc. Le trio Brayard-Rignomer-Hayidatallah constitue une belle petite brochette de personnages bourrin-chaste-aventureuse très sympathique. Bien vite, toutefois, on se prend à imaginer comment la relation entre les personnages va évoluer pour se rendre compte qu’on était pas tout à fait à côté de nos chausses à la fin de la lecture. Du point de vue de l’histoire, il n’y a donc pas véritablement de surprise dans Chevalier Brayard, pas de moment de tension ou d’apogée particuliers non plus. Non, s’il y a de petites perles à aller dénicher dans cet album, c’est du côté des dialogues qu’il faut aller les chercher. Et là, ça part dans tous les sens. D’une part, Zidrou construit un récit d’aventure qui distille ses petites leçons de vie parfois en forme de pique à destination des monothéismes, mais aussi avec des séquences émouvantes. D’autre part, Chevalier Brayard est un véritable recueil de répliques drôles et tranchantes, avec un brin d’anachronisme de temps à autre, qui fleurent parfois bon le Kaamelott. Beau compliment s’il en est.
Le travail de Porcel au dessin ne sert pas principalement quant à lui la dimension humoristique de ce one-shot, même si on y croise quelques personnages secondaires aux faciès bien abrutis. Il se focalise davantage sur la mise en scène de la violence et du caractère un peu primitif dans lesquels on a longtemps pensé que s’était déroulé le « moyen-âge » (d’où ce nom). Ça tranche sec et ça écrabouille bien dans Chevalier Brayard. D’un point de vue purement graphique, je ne suis pas particulièrement friand du style de Porcel dans cet album. J’avais même quelques doutes à propos du trio au début de l’album pour finalement les trouver très réussis, surtout cette montagne paillarde mais chevaleresque de Brayard. Le découpage se révèle assez classique lui aussi.
Quelques bonnes tranches de rigolade sont au programme de ce Chevalier Brayard et viennent rythmer un récit qui manque du petit je ne sais quoi qui fait qu’on a envie d’en reprendre une rasade tout de suite.
Autres critiques : Yvan Tilleul (Sin City)