Les Cités divines, tome 2 : La Cité des Lames
Titre : La Cité des lames
Cycle/Série : Les Cités divines, tome 2
Auteur/Autrice : Robert Jackson Bennett
Éditeur : Albin Michel (Imaginaire)
Date de publication : 2024 (octobre)
Synopsis : Alors qu’elle profite d’une retraite bien méritée au bord de l’océan, passant ses journées à boire du vin, à pêcher et à transformer chacun de ses proches voisins en ennemi mortel, la générale Turyin Mulaghesh reçoit la visite d’un fonctionnaire de Saypur. La Première ministre Shara Komyad a une mission pour elle. Une agente a disparu à Voortyashtan, la Cité des Lames, ancienne demeure de la déesse de la guerre et des massacres. Cette disparition semble être liée à la récente découverte d’une substance minérale : la thinadeskite qui amplifie mystérieusement la puissance de tout courant électrique. Si les propriétés de ce minéral sont miraculeuses, cela signifie qu’un dieu en activité se cache quelque part dans la cité des lames ou aux alentours. Un dieu ou une déesse ? Pourvu que ça ne soit pas Voortya, espère Mulaghesh.
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Nouvelle cité… nouveaux ennuis !
Révélé au grand public en 2018 avec la publication par Albin Michel Imaginaire de son roman « American Elsewhere », Robert Jackson Bennett s’est aujourd’hui bâti une solide réputation dans le petit milieu de l’imaginaire, naviguant entre SF, fantasy et fantastique au gré des parutions. Après le succès de la série des « Maîtres enlumineurs », c’est donc au tour de la trilogie des « Cités divines » de faire l’objet d’une publication en français (avec une superbe couverture signée Didier Graffet). Dans « La cité des marches », l’auteur posait les bases d’un monde foisonnant dans lequel une ancienne nation colonisée (Saypur) serait parvenue à se libérer de ses chaînes et à coloniser à son tour l’empire qui l’avait asservie (le Continent). Cette inversion des forces en présence a provoqué la disparition des divinités qui dominaient le continent tandis que toute forme de magie a été éradiquée et toute référence à cette dernière proscrite. C’est dans ce contexte que l’on avait fait la connaissance de Shara, une agente des services de renseignements saypuriens chargée d’enquêter sur la disparition d’un universitaire à priori tout à fait inoffensif. Évidemment tout à très vite dégénéré, et la thèse selon laquelle les dieux et déesses auraient définitivement passé l’arme à gauche en a pris un sérieux coup. Dans ce deuxième tome, on change d’héroïne (adieu Shaya, bonjour Mulaghesh) et de lieu (bye bye Bulikov, hello Voortyashtan), mais pas d’histoire. La trame principale est en effet relativement similaire à celle du premier volume puisqu’on retrouve ici la générale chargée d’enquêter incognito sur la disparition inquiétante d’une agente saypurienne envoyée pour récolter des informations sur cette ville portuaire isolée mais stratégique et actuellement en pleine reconstruction.
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Comme à Bulikov, le climat est sans surprise extrêmement tendu, et ce d’autant plus que la reconstruction en cours ne manque pas de provoquer des tensions avec les autorités locales, puisque se pose la question de qui profitera des retombées économiques substantielles qui ne manqueront pas d’en découler. Ajoutez à cela la découverte d’une nouvelle substance minérale énigmatique, des tensions au sein même de la garnison laissée sur place, une colère croissante des tribus locales et des visions perturbantes d’un passé traumatique pour Saypur, et vous aurez une petite idée du cocktail explosif qui menace d’exploser à Voortyashtan. Voilà pour le pitch de base qui, il faut bien le constater, possède énormément de points communs avec le premier tome. La trame narrative est en effet quasiment la même, à quelques exceptions près : on a affaire à une officielle saypurienne parachutée dans un environnement hostile ; une enquête sur une disparition qui cache en fait un problème beaucoup plus vaste ; des retrouvailles avec un homme avec lequel l’héroïne a eu un passé tumultueux ; sans oublier bien sûr une confrontation avec différentes formes de magie qui continuent à imprégner ce continent visiblement bien moins pacifié qu’on ne pouvait le croire. Cette redondance est assez déstabilisante car on a parfois franchement l’impression d’avoir une redite de « La cité des marches », avec simplement un décor et des personnages différents. Cette absence partielle de nouveauté contribue en partie au désintéressement progressif des lecteurices pour cette intrigue qui a aussi la fâcheuse tendance à traîner en longueur. Le livre est en effet un sacré pavé, et je n’aurais personnellement pas été contre un bon coup d’écrémage afin de rendre le tout plus digeste. On se retrouve en effet ici avec une enquête qui patine alors que l’héroïne croule sous une multitude de pistes développées dans une multitude de sous intrigues qui sont loin d’être toutes trépidantes.
Univers et personnages
Dernier reproche (après j’arrête, promis) la surenchère dans le spectaculaire. C’était déjà un bémol que j’avais pu souligner dans « Les maîtres enlumineurs » (une trilogie que j’ai pourtant adoré) mais Robert Jackson Bennett a la fâcheuse tendance à profiter du budget illimité que lui procure l’écriture pour mettre le paquet sur les scènes d’action qui sont remplies de gros méchants dotés de gros pouvoirs et faisant de gros dégâts. Voilà pour le côté négatif, mais vous vous doutez bien que si je suis venue à bout des presque six cents pages du roman, c’est bien qu’il y avait aussi quelques compensations. C’est le cas notamment de l’univers qui est toujours aussi accrocheur et ce d’autant plus qu’on devine que l’auteur en a encore sous le coude, ce qui donne une impression de profondeur toujours agréable en fantasy. Ensuite, Robert Jackson Bennett aborde des sujets intéressants et nous livre une fois encore une vision décalée et nuancée qui permet une remise en perspective de quelques tropes classiques à ce genre en particulier. La façon dont on légitime ou non la violence est une question par exemple centrale dans le roman et est abordée avec beaucoup de recul par l’auteur qui n’hésite pas pour cela à égratigner un peu ses personnages, y compris parmi les plus sympathiques. Ces derniers ne figurent pas parmi les plus convaincants mais sont tout de même de bonne facture, même si j’ai eu du mal à m’attacher à la plupart d’entre eux, y compris Mulaghesh, qui m’avait pourtant tapé dans l’oeil dans le premier tome.
Robert Jackson Bennett poursuit sa trilogie des « Cités divines » avec « La cité des lames », un deuxième tome mettant en scène la générale Mulaghesh en proie aux intrigues et mystères de la ville de Voortyashtan. Si le roman permet d’étoffer encore un peu plus l’univers et de planter un nouveau décor, force est de constater que ce deuxième opus présente de trop nombreuses similitudes avec le premier, ce qui engendre une certaine frustration, voire une lassitude chez les lecteurices.
Voir aussi : Tome 1 ; Tome 3
Autres critiques : Célinedanaé (Au pays des cave trolls)
Un commentaire
belette2911
Je l’ai plus apprécié que toi, on dirait 🙂 Je n’ai pas ressenti ce copier-coller de l’univers (mais ça, c’est chacun son ressenti) et j’ai vraiment pris du plaisir à découvrir ce chaudron bouillonnant qu’est Voortyashta.