Kosigan – Un printemps de sang
Titre : Kosigan – Un printemps de sang
Auteur : Fabien Cerutti
Éditeur : Mnémos
Date de publication : 2024 (août)
Synopsis : 1365. Ancien capitaine de mercenaires, assassin et espion, Pierre Cordwain, bâtard de la maison bourguignonne de Kosigan, est un homme redouté et insaisissable. En pleine guerre de Cent Ans, alors que Français et Anglais se déchirent, il s’introduit dans le comté dont il s’est enfui à la mort de son père. Pour « d’agréables retrouvailles en famille », sans doute… Au même moment, une délégation française négocie un accord avec le duc de Bourgogne, et Dùnevia Illavaëlle, une aventurière italienne aux pouvoirs de polymorphe, écume le comté d’Albret, alors que pour la première fois depuis des siècles le feu d’un dragon en déchire le ciel. Quel lien entre tous ces événements ? Qui œuvre à la chute du duc de Bourgogne ainsi qu’à la disparition de la lignée des Kosigan ? Et dans quel but ?
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Kosigan : le retour
Le bâtard de Kosigan est de retour ! Après un premier cycle de quatre volumes consacrés aux missions menées par Pierre Cordwain, bâtard d’une grande maison bourguignonne, à la tête de sa petite troupe de mercenaires, Fabien Cerutti poursuit donc les aventures de son héros avec un nouvel opus. L’action se déroule cette fois en 1365 et met en scène le retour dans sa contrée natale du bâtard, celle-là même dont on l’a chassé il y a des années et dont le comte en titre n’a eu de cesse d’envoyer des assassins à ses trousses ces dernières années. Pourquoi, alors, se jeter dans la gueule du loup ? D’abord parce que l’oncle du bâtard est, selon les rumeurs, sur le point de passer l’arme à gauche. Ensuite parce que son ancien mentor, commandant de la redoutable Garde Grise, lui a demandé de revenir en lui promettant l’immunité. Et puis, surtout, parce que de nombreuses questions restent en suspens concernant les origines du héros, et que la curiosité de ce dernier le titille. Alors, piège ou opportunité ? Le bâtard, on le sait, est un sacré joueur, aussi n’est-il guère surprenant de le voir tenter le diable. On sait aussi qu’il peut se révéler particulièrement retors, et qu’il cherche toujours à avoir un coup d’avance, ce qui ne rend son retour que plus palpitant. Parallèlement à l’histoire de Cordwain, on suit également celui de Dùn, l’une de ses camarades mercenaires capable de changer d’apparence à loisir, qui arpente le comté d’Albret où se concentre une troupe inquiétante composée d’ogres, d’elfes noirs, et même d’un dragon. Au même moment, le connétable Olivier de Montfort est envoyé par le roi de France en mission diplomatique chez son cousin bourguignon afin de négocier une trêve. Autant d’événements qui ne sont évidemment pas sans lien les uns avec les autres et qui pourraient bien mettre à mal les plans de Kosigan et ses retrouvailles avec sa délicieuse petite famille.
Une nouvelle galerie de personnages
On retrouve avec plaisir les personnages de la précédente série, dont le protagoniste qui n’a pas pris une ride et se révèle toujours aussi ambivalent. Car si son esprit retors et son côté canaille lui donnent un charme fou, difficile malgré tout d’oublier que le personnage agi essentiellement par pur égoïsme et est capable du pire s’il pense qu’il pourra en tirer profit. Dùn, en revanche, est une héroïne certes plus classique mais aussi plus attachante, à laquelle on ne manque pas de s’identifier. Avec Kosigan ils forment un duo convaincant qui permet au récit d’alterner entre mystères et intrigues politiques côté bâtard, et scènes d’action épiques côté Dùn, dont la mission dans ce tome-ci est loin d’être de tout repos. Pour accompagner le retour de son héros, Fabien Cerutti a convoqué une galerie de nouveaux personnages souvent aussi ambigus que le bâtard, si bien que l’un des principaux enjeux du roman consiste à parvenir à cerner leurs véritables motivations, et ainsi comprendre qui joue double-jeu et qui est sincère. Et c’est loin d’être évident ! Les « méchants » de l’histoire sont cependant assez caricaturaux et possèdent des profils très stéréotypés parmi lesquels celui de la vicieuse petite intrigante, de la bute sans cœur et fanatisée, ou encore du sorcier puissant et sans scrupule commettant les pires atrocités au nom de l’intérêt général. La plupart des personnages sont toutefois plus travaillés que cela et parviennent à marquer les lecteurices par leur parcours atypique, mais aussi leur sens de l’humour ou de la répartie. C’est le cas par exemple du nouveau commandant de la compagnie de mercenaires de Kosigan, mais aussi de la fille du duc de Bourgonne, ou encore de l’entourage de la famille d’Albret avec qui Dùn va effectuer une partie de son périple.
Le Moyen âge version fantasy
Outre le protagoniste, on prend également beaucoup de plaisir à renouer avec l’univers de Fabien Cerutti. Un univers dans lequel des érudits du XIXe découvrent avec effarement que l’histoire telle qu’on la connaît ne serait que partiellement exacte puisqu’elle reposerait sur la dissimulation de l’existence de peuples et créatures magiques ayant vécu aux côtés des humains jusqu’à la fin du Moyen Age. Le monde du bâtard est ainsi peuplé d’elfes, d’ogres, de dragons ou encore de sorciers qui ont évidemment un rôle à jouer dans le conflit qui oppose à l’époque le roi de France au roi d’Angleterre, mais aussi au duc de Bourgonne. Ce mélange entre des éléments purement « fantasy » et des événements historiques constitue depuis le premier tome la marque de fabrique de Cerutti, et aussi l’un des principaux atouts de la série. Et ce d’autant plus que l’auteur a encore une fois opté pour un astucieux jeu de mise en abyme, jonglant entre l’histoire du bâtard et celle de son descendant du XIXe désireux de communiquer au public ses découvertes sur cette époque médiévale inconnue, revisitée par le prisme de la fantasy. Un Moyen âge d’autant plus immersif que l’auteur a pris soin d’adapter sa plume et son ton, employant régulièrement mots et expressions propres à la période. Cela pourrait se révéler lourd ou maladroit, mais l’humour sous-jacent permet heureusement d’éviter cet écueil, rendant au contraire ces petites références amusantes.
« Kosiagn – Un printemps de sang » est un roman mêlant agréablement fantasy et histoire qui ravira autant les amateurs de la série des « Bâtard de Kosigan » que les novices qui n’auraient pas encore eu l’honneur de rencontrer le charismatique mercenaire. Fabien Cerutti rassemble à nouveau ici tous les ingrédients qui avaient déjà fait le succès de sa série : des personnages retors qu’on adore détester, une intrigue alambiquée pleine de surprises, de l’humour, de l’action… Bref, un régal !
Autres critiques : L’ours inculte ; Célinedanaë (Au pays des cave trolls)
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