Science-Fiction

La mort du temps

Titre : La mort du temps
Auteur : Aurélie Wellenstein
Éditeur : Scrinéo
Date de publication : 2017 (mai)

Synopsis : Un éclair aveuglant, suivi d’une terrible onde de choc…En l’espace de quelques minutes, un séisme temporel ravage la Terre, et la vie de Callista bascule. Le monde qu’elle connaissait n’est plus. Les différentes époques se sont mélangées, les corps des survivants ont fusionné les uns avec les autres ou avec leur environnement. Indemne, Callista avance au hasard, à la recherche d’un refuge dans ce chaos. Talonnée par le « Flash », réplique mortelle du tremblement de terre, elle rencontre d’étranges créatures, amies ou ennemies, issues de siècles différents. Pour la jeune fille, une lutte terrifiante s’engage au rythme des pulsations du Flash. Si elle s’arrête ou ralentit, elle sera anéantie…


 

Au début ils traversèrent beaucoup de forêts vandales, épaisses et noires. Puis ils gravirent les pentes herbeuses de volcans verts, montèrent et descendirent les courbes de collines sur lesquelles on apercevait de loin en loin des châteaux forts. Ils dormirent dans une cité antique, où les dômes dorés rivalisaient de hauteur avec des minarets de marbre rose. Leurs pas crissèrent sur un chemin d’obsidienne, dont les pierres noires se brisaient comme de la porcelaine. Un fleuve leur coupa la route. Ils escaladèrent un pont terrible, à peine un squelette d’acier. Le vent rugissait dans la dentelle des poutres et des câbles. On perdit plusieurs personnes ce jour là.

Callista, seize ans, se réveille d’un coma après un accident de voiture et découvre que le monde tel qu’elle le connaissait a complètement disparu. Pas le temps de pleurer les disparus ou de se faire à cette nouvelle réalité : il faut fuir, vite ! Jusque là rien de bien original, sauf que l’apocalypse décrit par Aurélie Wellenstein n’a rien à voir avec celles constamment mises en scène dans les films et les romans à la mode aujourd’hui. Ici pas de zombies, pas d’épidémies et pas de catastrophes naturelles ! Non, dans « La mort du temps », la fin du monde est causée par l’arrivée d’un étrange phénomène baptisé « le Flash » qui, depuis Paris, s’étend inexorablement au reste de la France et détruit tout sur son passage. Pour ceux qui veulent survivre, il ne reste qu’une solution : marcher, marcher et marcher. Des jours, des semaines, des mois à avancer, en ne s’arrêtant que pour regagner un peu de force avant que le Flash, inévitablement, ne rattrape son retard sur les fuyards. Pour corser un peu l’épreuve, il se trouve que cette force destructrice s’accompagne aussi de désordres temporels qui se manifestent de manière plus ou moins chaotique par l’apparition d’objets, de décors ou même d’hommes et d’animaux issus d’autres époques. Au cours de son périple, notre jeune héroïne croisera ainsi la route de chevaliers du Moyen Age, de poilus hébétés d’avoir été arrachés à leurs tranchées, de villes antiques appartenant à telle ou telle civilisation, ou encore de dinosaures. L’occasion pour l’auteur de laisser la bride à son imagination et de convoquer des visions véritablement saisissantes, à l’image de ces tours de la cathédrale Notre-Dame de Paris prises d’assaut par des ptérodactyles, ou encore de la ville de Reims transformée en une espèce de patch-wok monstrueux mêlant les différents visages de la cité et les différentes époques qui l’ont marqué depuis sa création.

En dépit de leurs noms familiers, les territoires traversés n’ont donc plus grand chose à voir avec ceux que l’on connaît et c’est avec un regard tour à tour horrifié ou ébahi que l’on découvre la façon dont les paysages ont été modifiés par le Flash. Pendant près de trois cent pages le lecteur assiste donc à la fuite en avant de la jeune Callista dont le sentiment d’urgence devient rapidement contagieux et le pousse, à l’image de l’héroïne, à enchaîner les pages à défaut des pas. Difficile de résister à la tentation de lire le roman d’une seule traite, celui-ci ne souffrant d’aucun temps mort et gardant en réserve de quoi surprendre le lecteur jusqu’à la toute dernière page. Pour passionnante qu’elle soit, l’intrigue n’aurait qu’un intérêt limité si les personnages n’étaient pas à la hauteur, mais, fort heureusement, l’auteur ne nous déçoit pas non plus sur ce point. En dépit de son âge, Callista n’a rien à voir avec l’ado un peu clichée qu’on trouve trop souvent dans les romans étiquetés « young adult ». On s’identifie sans mal à cette jeune fille vulnérable amenée à commettre des actes parfois répréhensibles sous le coup de la peur ou de la colère. Le trio qui constitue son entourage n’est d’ailleurs pas en reste, à commencer par la petite Jeanne qui apporte une touche d’humour bienvenue venant quelque peu contrebalancer la noirceur de l’ensemble. Le duo de protagonistes restant n’étonnera pas les lecteurs assidus d’Aurélie Wellenstein puisqu’il s’agit de deux figures que l’on retrouve dans presque tous ses romans : le premier est un chasseur ayant fusionné avec le loup qu’il traquait, le second un chevalier transformé en une sorte de centaure monstrueux (personnage déjà mis en scène dans la nouvelle « Bucéphale au cœur des ombres »). Le quatuor fonctionne à merveille et on se prend très vite d’affection pour chacun de ses membres, en dépit du caractère ou du passé parfois difficile de certains d’entre eux.

 

Avec « La mort du temps », Aurélie Wellenstein signe un roman palpitant que l’on dévore en un temps record avec grand plaisir. Un pitch original, une héroïne attachante et peu ordinaire, un rythme haletant d’un bout à l’autre et surtout une chute bien amenée et tout à fait satisfaisante : l’ouvrage ne manque pas d’atouts pour vous faire passer un bon moment, et ce quel que soit votre âge. Un vrai coup de cœur !

Autres critiques :  Blackwolf (Blog-O-livre) ; Célindanaé (Au pays des cave trolls)

Critique réalisée dans le cadre du Challenge Summer Short Stories of SFFF 3

Antiquiste passionnée d’art, de cinéma, de voyage et surtout grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement).

14 commentaires

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