Fantasy

Interview de Jean-Louis Fetjaine (juin 2017)

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Toujours suite à notre visite aux Imaginales d’Epinal, voici l’interview de Jean-Louis Fetjaine qui, après Jean-Philippe Jaworski et Melchior Ascaride, a eu la gentillesse de bien vouloir répondre à nos questions.

Le Bibliocosme : Vous situez l’action de votre dernier roman, « Djinn », dans le Moyen-Orient du XIIe siècle. Pourquoi avoir fait le choix de cette période historique ?

Jean-Louis Fetjaine : J’avais envie de changer d’univers, après de nombreux romans traitant de l’imaginaire celtique et arthurien. Il y a, dans l’époque des Croisades, un aspect romanesque évident, mais aussi de nombreuses zones d’ombres, qui permettent un peu de Fantasy.

Le Bibliocosme : On retrouve dans la période que vous dépeignez quelques similitudes avec le contexte actuel de la région. Quels liens faites-vous entre l’actualité et votre envie d’écrire sur ce sujet ?

Jean-Louis Fetjaine : Les ressemblances sont effectivement évidentes avec l’actualité dramatique de la Syrie. L’action –authentique – de l’époque se situe entre Damas, Mossoul, Alep et Jérusalem, avec le rôle prédominant des Turcs ou celui de la secte des Assassins, qui fait penser à Daesh même si en réalité ça n’a rien à voir. On voit en fait que les luttes entre sunnites et chiites sont millénaires et que les enjeux actuels de la région existaient déjà à l’époque.

Le Bibliocosme : Le récit se concentre essentiellement sur le parcours mouvementé de la princesse Alix. Pouvez-vous nous présenter un peu le personnage et ce qui vous a séduit dans son histoire ?

Jean-Louis Fetjaine : Alix est l’une des quatre filles du roi Baudouin de Jérusalem, qui auront toutes un rôle de premier plan dans chacun des États latins d’Orient. La plus jeune se fait nonne, mais les trois autres sont au cœur de l’Histoire : l’aînée, Mélisende, devient reine de Jérusalem et durant un temps gouverne seule. La seconde, Alix, est princesse d’Antioche. La troisième, Hodierne, comtesse de Tripoli. Leurs maris respectifs sont tués à la guerre, assassinés ou victimes d’accidents, ce qui leur laisse, à un moment ou à un autre, les rênes du pouvoir.

Le Bibliocosme : L’écriture de ce roman a dû nécessiter un important travail de documentation, sur quelles sources vous-êtes vous appuyé ?

Jean-Louis Fetjaine : Il y a de nombreuses sources franques ou arabes sur l’époque, comme les chroniques de Guillaume de Tyr ou celles du prince syrien Ousama ibn Mounqidh. Mais aussi des textes plus récents, comme Les croisades de Zoe Oldenbourg, et de nombreux textes musulmans sur les djinns et le Coran.

Le Bibliocosme : Le roman laisse quelques questions en suspens (notamment en ce qui concerne le jeune Martin et son compagnon). Vous êtes-vous délibérément laissé des pistes pour d’éventuelles futures incursions dans cet univers ?

Jean-Louis Fetjaine : Comme souvent, je souhaite en faire une trilogie, chacun des tomes étant centré sur l’une des filles du roi Baudouin, et racontant en parallèle le destin de Martin Mazoir.

Le Bibliocosme : Ce n’est pas la première fois que vous vous focalisez sur un personnage féminin (Frédégonde et Brunehilde dans « Les reines pourpres », Guenièvre dans « Guinevere » par exemple). Qu’est-ce qui vous attire dans ces figures féminines historiques et légendaires ?

Jean-Louis Fetjaine : L’Histoire réelle est un puits sans fond d’histoires. C’est vrai que je préfère écrire sur des figures féminines fortes, d’une part parce que ça remet en question la vision très masculine qu’on peut avoir du Moyen Âge, alors que c’est une époque où, au contraire, les femmes dirigeaient fréquemment des États, et d’autre part parce que ça permet d’adoucir le propos, de travailler la psychologie des personnages et pas seulement se focaliser sur les scènes d’action.

Le Bibliocosme : Vous avez beaucoup écrit sur les légendes arthuriennes ; avez-vous été influencé dans ce domaine par des éléments particuliers (textes, iconographies, lieux…) ?

Jean-Louis Fetjaine : J’ai fait des études d’histoire médiévale et le roman arthurien est la base du roman tout court. C’est une légende, mais c’est aussi une part cachée de notre histoire puisque les récits arthuriens sont souvent basés sur des personnages ayant existé. Plus on creuse le sujet, plus on découvre de nouvelles choses… Et puis je vis une partie de l’année en Bretagne, où la légende arthurienne est très présente.

Le Bibliocosme : « Guinevere » est venu clore votre série des « Chroniques des elfes ». Pourquoi avoir choisi de mettre l’accent sur ce personnage en particulier pour mettre fin à cette série sur le mythe arthurien ?

Jean-Louis Fetjaine : Ce n’est pas forcément la fin de la série… Mais Guenièvre est intéressante et méconnue. En Français, son nom rime avec « mièvre » et son personnage st souvent décrit comme une faible femme, ballottée entre son rôle de reine et son amour pour Lancelot. Or dans les textes originaux gallois, son nom est Gwenwyffar, ce qui signifie « blanc fantôme ». Autrement dit, Guenièvre est une Dame Blanche. Un être surnaturel qui, dans l’imaginaire celtique, apporte la mort et le malheur… Ce qui est exactement son rôle dans l’histoire arthurienne. Avouez que ça change la perspective !

Le Bibliocosme : Êtes-vous vous-même lecteur régulier de science-fiction, fantasy ou fantastique ? Et si oui, avez-vous un ou des auteurs en particulier à conseiller ?

Jean-Louis Fetjaine : Non, pas vraiment. Le Seigneur des Anneaux a été une révélation, mais en dehors de ça je n’ai pas beaucoup lu, également pour ne pas être influencé.

Le Bibliocosme : Pouvez-vous nous parler du projet sur lequel vous travaillez actuellement ?

Jean-Louis Fetjaine : La suite de Djinn. Mais c’est trop tôt pour en parler.

Merci à Jean-Louis Fetjaine d’avoir pris le temps de répondre à nos questions !

Passionnée d'histoire (surtout le XIXe siècle) et grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement) mais aussi d'essais politiques et de recherches historiques. Ancrée très à gauche. Féministe.

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