Les jours étranges de Nostradamus
Titre : Les jours étranges de Nostradamus
Auteur : Jean-Philippe Depotte
Éditeur : Folio SF
Date de publication : 2011 (2013 pour la version poche)
Récompenses : Prix Masterton 2012 (roman français)
Synopsis : Médecin protestant lyonnais, disciple de la médecine nouvelle d’Ambroise Paré, Philibert Sarrazin se rend à Paris pour participer à une dissection clandestine. Piégé, il se retrouve battu et enlevé par les hommes de main d’un mystérieux gentilhomme de la Cour. Ce proche du roi lui ordonne, parce qu’il est son beau-frère, d’aller espionner Michel de Nostredame, l’illustre Nostradamus. Emporté par un complot qui le dépasse, Philibert se lance sur les traces de l’astrologue, jusqu’à Salon, en Provence, terre de fantasmes et de sorcellerie, à travers la peste et la guerre civile. Là, il touchera du doigt le secret de Nostradamus, le secret de sa science et de ses mystérieux voyages, le secret de la mort de sa première épouse. Autant de révélations surprenantes. Dangereuses.
Tu es comme les autres. Tu ne vois d’elle que son physique de succube. Les hommes sont tous les mêmes. Qu’ils sentent se refermer sur eux le pouvoir d’une femme et ils crient à la sorcière. J’ai bien vu comment les hommes la regardent. Des phalènes autour d’une flamme. La sorcellerie, elle est dans leurs yeux impudiques. Jusqu’au jour où l’un d’eux, plus faible que les autres, ira la pendre ou la brûler.
Nostradamus… Un nom qui fait rêver et recèle aujourd’hui encore de nombreux mystères. Tour à tour médecin ou astrologue, prophète ou charlatan, hérétique ou envoyé de Dieu… : difficile de se faire une idée sur Michel de Nostredame, réputé dans toute la France, et même toute l’Europe, comme un véritable devin ne s’étant jamais trompé dans ses prédictions. Et vous n’en apprendrez guère plus avec ces « Jours étranges de Nostradamus », second roman de Jean-Philippe Depotte dont la lecture m’aura laissé un sentiment très mitigé. On y suit le parcours d’un certain Philibert Sarrazin, médecin lyonnais et beau-frère de Nostradamus, qui se retrouve bien malgré lui entraîné dans une véritable conspiration contre l’astrologue qu’on lui demande de trahir. De Paris à la petite ville de Salon, lieu de résidence du devin, le pauvre Philibert se voit lancer dans une véritable fuite en avant sans rien comprendre de ce qui lui arrive ni des épreuves qui lui sont imposées. La peste, l’inquisition, la sorcellerie, une révolte…, rien ne lui sera épargné. A ceux qui espéraient un roman centré sur le célèbre astrologue, je dis « passez votre chemin », car si la figure de Nostradamus reste tout au long du roman au cœur de l’intrigue, on en apprend peu sur le personnage qui, finalement, n’est que très peu présent. Malgré un certain nombre de défauts, il serait cela dit dommage de passe à côté de ce roman qui offre au lecteur une expérience de lecture, à défaut de captivante, du moins intéressante.
Parmi les principaux points positifs figure évidemment la minutieuse reconstitution effectuée par l’auteur de la France du XVIe siècle : les subtilités du conflit entre catholiques et protestants et les tentatives de la couronne (et notamment de Catherine de Médicis) afin de maintenir la concorde ; les progrès de la médecine avec l’arrivée des théories de Vésale ou d’Ambroise Paré ; la persistance au sein du peuple des vieillies superstitions païennes… L’auteur parvient avec talent à nous faire saisir toute la complexité de cette époque trouble pour le royaume de France, tant grâce à ses abondantes recherches sur le sujet que grâce à son style très agréable qui emporte le lecteur sans difficulté. Mais on ne saisit véritablement tout le talent de Jean-Philippe Depotte et l’incroyable complexité de son histoire qu’à la toute fin du roman. Une fin qui sonne comme une claque et offre un retournement de situation incroyable. Avec minutie et patience, l’auteur est parvenu à tisser tout au long de l’ouvrage une redoutable toile d’araignée (pour reprendre une image utilisée dans le roman) dans laquelle le protagoniste comme le lecteur se rendent compte trop tard qu’ils se sont naïvement laissés piégés. Pour cette raison, le roman mériterait très certainement une seconde lecture, une fois le subterfuge révélé, afin de pouvoir relever tous les indices et détails qui auraient pu nous échapper ou qui pouvaient sembler complètement anodins sur le moment et dont on comprend à présent l’importance.
Malgré ses indéniables qualités, l’ouvrage n’est cependant pas exempt de tout défaut, à commencer par sa trop grande lenteur. Malgré son nombre de pages conséquent, le roman limite en effet l’action au minimum, si bien que l’intrigue peine à décoller tandis que certains passages semblent durer une éternité. Il faut ainsi attendre d’avoir dépasser les trois cents premières pages pour qu’enfin les évènements se précipitent vraiment et, s’il serait mentir que de parler d’ennui, il n’en reste pas moins qu’un léger sentiment de frustration pointe de temps à autre le bout de son nez. Le plus gros bémol du roman reste cela dit son protagoniste. Car bien qu’il soit loin d’être antipathique, ce qu’il peut être agaçant, ce Philibert Sarrazin ! Rarement au cours de mes lectures je n’ai eu autant envie de secouer un personnage. Car à force de constamment se borner à son rôle de spectateur et à toujours esquiver les confrontations, notre médecin lyonnais fait inutilement traîner les choses en longueur, et ce pour le plus grand agacement du lecteur qui attend avec impatience que l’histoire daigne enfin avancer. Cela est d’autant plus dommage que, lorsqu’il se décide enfin à prendre une décision (et surtout à s’y tenir ! ), le personnage se fait bien plus intéressant et attachant. Louise, l’épouse de Philibert, peut également parfois susciter l’agacement, notamment au cours de la première partie du récit, mais les autres personnages sont pour leur part plutôt réussis, même si souvent trop énigmatiques.
Avec « Les jours étranges de Nostradamus », Jean-Philippe Depotte signe un bon roman qui va bien au delà d’une simple fiction consacrée au célèbre astrologue. Malgré la trop grande lenteur du rythme et le côté mollasson du personnage, on se laisse aisément embarquer dans cette histoire bien plus complexe qu’il n’y paraît et dont la fin à elle seule rehausse considérablement la qualité du livre. A tenter.
Aucun commentaire
belette2911
La SF, décidément, pas fait pour moi. Je devrais l’essayer un peu plus, mais j’arrive pas à me décider. Ma grande PAL doit jouer en ma défaveur.
Boudicca
A mon avis le roman appartient davantage au genre fantastique (voire fantasy historique) qu’à la SF. J’avoue que j’ai eu beaucoup de mal à m’y mettre aussi mais ça m’a permis de faire quelques belles découvertes. Même si ça ne remplace évidemment pas la fantasy 😉
belette2911
Avant, je lisais pas de fantasy et puis, un jour, un elfe, un nain et un beau mec ont débarqué dans mon cinéma, avec des Hobbits… 😉 Depuis, j’en lis !
De SF, j’ai lu des quelques livres, mais pas de vaisseau spatiaux dans les parages.
Boudicca
Tient c’est drole, ton histoire me rappelle la mienne 😉 (merci Tolkien ! )
Je ne suis pas fan non plus des histoires de vaisseaux spatiaux ou voyages galactiques, je me limite à de la SF un peu moins « technique » pour le moment ^-^
belette2911
Moi, je dirais d’abord « Merci Jackson » ! (et pas le chanteur) qui a réalisé de super films qui m’ont donné envie de découvrir Tolkien. Pour une fois qu’un film tiré est bien réalisé.
Boudicca
Tu prêches une convertie 🙂 Amen à Peter Jackson !
belette2911
Quel mec, celui-là ! 😉
belette2911
Zut, mauvaise manip : il y a lieu de lire « pour une fois qu’un film, tiré d’un livre, est bien réalisé » ! 😉
Non, les vaisseaux spatiaux, dans Albator, Ulysse 21, ça passe, mais dans la littérature, je suis moins fan.