Science-Fiction

Acadie

Acadie

Titre : Acadie
Auteur : Dave Hutchinson
Éditeur : Le Bélial’ (Une Heure-Lumière) [site officiel]
Date de publication : 29 août 2019 (2017 en VO)

Synopsis : Il y a la Colonie, une constellation d’habitats spatiaux cachée au sein d’un système stellaire isolé et sans intérêt. Et puis il y a Duke, le Président de ladite Colonie, élu au poste car il était précisément le type qui le désirait le moins. Essentiellement honorifique, le job s’avère toutefois offrir certains avantages. En temps normal… Car voilà qu’une sonde terrienne franchit les limites du système. La pire des nouvelles au regard des membres de la Colonies, eux qui, sous la houlette d’Isabel Potter, généticienne de légende, ont élaboré une utopie contrainte de fuir l’autorité du Berceau depuis plus de cinq siècles. Or, en ce qui concerne le viol des strictes lois bioéthiques terriennes, il n’existe aucune prescription, et la Colonie n’encourt rien moins que l’annihilation. Sauf à ce que Duke, contre toute attente, ne se révèle l’homme de la situation…

La Colonie ne possède pas de gouvernement en tant que tel. Chaque habitat élit annuellement le représentant d’une sorte de vague corps consultatif dont le but est de s’assurer que la machine fonctionne sans heurts. D’après le principe voulant qu’on ne peut décemment pas confier le pouvoir politique aux personnes qui le recherchent, les seuls membres admis au sein de ce collège sont ceux qui ne désirent absolument pas en faire partie. Comme ça vaut pour à peu près tout le monde, les deux ou trois mois précédant les élections voient généralement s’orchestrer une avalanche de campagnes guignolesques à l’enthousiasme suffisant pour disqualifier le moindre candidat. J’ai moi-même mené de belles campagnes par le passé, et j’ai longtemps réussi à esquiver le tir, mais je me trouvais hors-système lors du dernier suffrage, occupé à ramener quelqu’un jusqu’à Nova California. Les autres y ont vu le signe d’un désintérêt envers la politique, et à mon retour, j’ai découvert que non seulement j’avais été élu, mais que les sales fourbes avaient interprété mon absence comme la preuve que je n’en avais vraiment rien à battre, aussi m’avaient-ils carrément nommé Président.

Nouvel opus de la collection Une Heure-Lumière et forcément de l’attente pour découvrir un texte habile, ici de Dave Hutchinson paru fin août 2019 chez Le Bélial’, cet « Acadie » a été nommé au prix Locus 2017.

À la poursuite des exilés

Acadie est une novella qui nous présente une colonie isolée du reste des planètes habitées par des groupes humains issus de la Terre. En l’occurrence, c’est pour une bonne raison, car ceux qui ont créé cette Colonie ont fui la Terre il y a plusieurs centaines d’années en raison de désaccords sur l’usage prohibé de transformations génétiques à leur profit. Ainsi, reclus dans un système stellaire en marge et non encore découvert par les Terriens, les habitants de cette Colonie ont pu tranquillement développer de nouvelles technologies, allongeant leur durée de vie et permettant à certains d’atteindre un niveau de conscience particulièrement avancé. Or, dès les premières pages, il se trouve qu’une sonde de reconnaissance terrienne entre dans leur système ; c’est le branle-bas de combat pour éviter d’être repéré.

Duke l’opportun

Face à cette situation de crise, doit agir Duke, président du moment de cette Colonie. C’est avant tout lui qui narre l’histoire et qui apporte les meilleurs éléments au récit. En effet, puisqu’ils ont créé une sorte d’utopie en marche (et en marge d’ailleurs), le système politique proposé est « légèrement » différent et ce Duke a été désigné président, car c’est lui qui le désirait le moins. C’est bien pratique pour éviter la concentration de pouvoirs entre des mains mal intentionnées. Cela donne forcément un ton décalé à son point de vue, puisqu’il dénigre assez vite sa position de faire-valoir en matière de politique, mais doit rapidement se fondre dans son rôle afin de résoudre la crise et, en l’occurrence, organiser le nouvel exil forcé de ses concitoyens. Par des chapitres courts et rythmés, un peu de détente de sa part ne fait donc pas de mal pour désamorcer par l’humour le péril qui les menace.

Profondeur du récit

Ce récit de fuite est l’occasion de glisser ça et là quelques thèmes plus porteurs comme l’intelligence artificielle ou bien l’ingénierie génétique. Même si elles ne sont pas du tout au centre de l’intrigue, Dave Hutchinson glisse quelques considérations concernant l’éthique à suivre sur les opportunités offertes par les transformations génétiques des humains. Doit-on tout tenter en espérant que notre espèce en fera quelque chose de positif plus tard ? Doit-on sacrifier quelques éléments afin de faire progresser technologiquement l’espèce entière ? Et qui laisser en arrière ? L’auteur réussit à jouer avec ces thèmes pour approfondir la simple histoire de fuite qu’il dessinait au premier abord.

Habile donc que cette novella qui, sans être inoubliable, recèle de bonnes idées avec un bon narrateur et de quoi surprendre le lecteur.

Autres critiques :
Allan Dujipérou (Fantastinet)
Célindanaé (Au pays des Cave Trolls)
FeydRautha (L’Épaule d’Orion)
Jean-Philippe Brun (L’Ours inculte)
Marc Ang-Cho (Les Chroniques du Chroniqueur)
OmbreBones (Chroniques de l’Imaginaire)
Scribouillard (C’est pour ma culture)

Kaamelotien de souche et apprenti médiéviste, tentant de naviguer entre bandes dessinées, essais historiques, littératures de l’imaginaire et quelques incursions vers de la littérature plus contemporaine. Membre fondateur du Bibliocosme.

8 commentaires

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