Fantasy

Dehors les chiens, les infidèles

Titre : Dehors les chiens, les infidèles
Auteur : Maïa Mazaurette
Éditeur : Mnémos / Folio SF
Date de publication : 2008 / 2010

Synopsis : « Dehors les chiens, les enchanteurs, les impudiques, les meurtriers, les idolâtres. Moi, Jésus, je suis l’étoile brillante du matin. » Apocalypse de Jean, XXII, 15-16. Quatre-vingts ans après la défaite des forces de la Lumière face aux Ténèbres, le monde ne connaît plus que la nuit éternelle. Seul espoir de voir un jour se lever le soleil : la Quête. Tous les cinq ans, un groupe de cinq adolescents spécialement entraînés part à la recherche de l’Etoile du Matin, arme légendaire, seule capable de lever la malédiction divine qui frappe l’humanité.

Le paradis ne s’embarrasse pas de nuances, et la route pour l’atteindre est parfois excessivement cruelle. Notre religion n’est-elle pas fondée sur un calvaire injustifié ? Oui, parfois des innocents sont tués. Et il faut qu’il en soit ainsi .

 

Vous aimez la Dark fantasy ? Alors « Dehors les chiens, les infidèles » fait incontestablement partie de ces romans à côté desquels vous ne pouvez pas passer. Si la plupart des auteurs qui veulent donner une touche de noirceur à leur univers se contentent généralement de glisser une ou deux scènes un peu rudes sans guère aller plus loin, Maïa Mazaurette, elle, ne fait pas dans la dentelle : c’est (très) sombre, (très) cru et (très) amoral ! Pour le coup la comparaison avec l’œuvre de Glen Cook (souvent utilisé comme « argument vente » par les éditeurs) n’est pour une fois pas complètement usurpée. Le roman nous entraîne sur les traces d’un groupe de cinq « Quêteurs », guerriers, érudits ou inquisiteurs, lancés à la recherche de l’étoile du matin, une sorte de Saint-Graal censé ramener la lumière sur le monde. Car, fait plutôt original, nous avons affaire à du post-apo… médiéval. Le roman met en scène une société rongée par l’obscurité et ravagée par la guerre que se livrent depuis le déclenchement de l’apocalypse les forces d’Auriselle et de l’Occident noir. « Galaad le Preux partit en plein carême, Mourut le dimanche saint. Quand l’Étoile du Matin tomba au sol, Chacun sombra avec elle. Plus de pape, plus de Lumière, Plus d’autres Guides que ceux de la Quête. » Si Maïa Mazaurette n’est certes pas la première à tenter l’expérience du « post-apo historique », il faut avouer que les romans de ce type ne courent pas non plus les librairies.

Sur les ruines de notre Moyen Age, l’auteur bâtit un monde bien plus sombre que l’original tout en s’en inspirant pour développer une critique virulente de la religion et de ses inévitables dérives. Pour ce faire, Maïa Mazaurette nous plonge dans un monde terriblement dérangeant où tout n’est que ténèbres et violence, crasse et désespoir. Une vision inquiétante mais qui fait naître chez le lecteur une sorte de fascination morbide difficile à refréner, quant bien même nous n’avons ici qu’un aperçu très limité de ce Moyen Age uchronique. S’il y a un reproche que l’on pourrait faire à l’ouvrage, c’est d’ailleurs celui-là, car quel dommage de voir un univers avec un tel potentiel être exploité de façon aussi brève ! Les personnages sont à l’image de ce décor désespérant : torturés, complexes et pour la plupart plus intrigants que sympathiques. Le comportement et les exactions de certains laissent à plusieurs reprises un profond sentiment de malaise, à commencer par ceux de la belle et froide Inquisitrice Astasie, ou encore du discret mais sous estimé érudit Cyférien. On ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre ni jusqu’où les personnages sont prêts à aller pour garantir le succès de leur quête qui peut s’apparenter par bien des aspects à celle menée par les chevaliers de la légende arthurienne à laquelle l’auteur fait d’ailleurs référence à plusieurs reprises. La chute ne dépareille quant à elle absolument pas avec l’ambiance générale du récit : ambiguë et résolument sombre.

 

Véritable réussite, « Dehors les chiens les infidèles » nous plonge dans un univers sombre et violent qu’on aurait aimé arpenter davantage et qui propose une réflexion intéressante sur le fondamentalisme religieux et le totalitarisme. C’est torturé (souvent), dérangeant (parfois), mais que c’est passionnant !

Antiquiste passionnée d’art, de cinéma, de voyage et surtout grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement).

7 commentaires

  • L'ours inculte

    Très intéressant ça. Je note.

    La fantasy post-apo est souvent revenu ces dernières années, mais je l’ai vu plusieurs fois sous forme de twist (tu le sais pas au début et tu te rends compte qu’ils sont sur les ruines de notre monde à la fin), à tel point que la dernière fois que je l’ai vu, je me suis dit « encore ? ». Peut-être le début d’une mode.

    • Boudicca

      Ça m’est arrivé aussi à plusieurs reprises dernièrement : quand c’est bien fait ça ne pose pas trop de problèmes mais c’est vrai que ça devient redondant.

  • belette2911

    Je le note parce que même si je n’ai pas eu d’atomes crochus avec la compagnie noire, ce roman là m’intrigue et je ne dirais pas non à une petite découverte, même si ma PAL me dit que ce n’est pas raisonnable du tout ! 😀

    • Boudicca

      Même si ça reste de la dark fantasy, ça n’a vraiment rien à voir avec La compagnie noire alors peut-être que tu y seras plus sensible 🙂

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