Fiction historique

Henriquet – L’homme-reine

Titre : Henriquet – L’homme-reine
Scénariste et dessinateur : Richard Guérineau
Éditeur : Delcourt (Mirages)
Date de publication : 2017 (mars)

Synopsis : Mai 1574. Charles IX meurt, laissant son royaume déchiré par les guerres de Religion et toujours sous le choc du massacre de la Saint-Barthélemy. Catherine de Médicis rappelle son fils cadet Henri, alors roi de Pologne… Henri III aura surtout marqué l’Histoire par ses moeurs et ses frasques, avérées, qui auront masqué l’incroyable complexité politique à laquelle a du faire face ce monarque atypique.

Quand donc comprendras-tu qu’il te faut choisir, Henri ? Tu ne peux être Philippe II d’Espagne et César Borgia en même temps !

 

Après avoir adapté en bande dessinée le roman de Jean Teulé « Charly 9 » consacré au roi éponyme, Richard Guérineau se reprend d’intérêt pour la monarchie française et s’attaque ici au portrait d’un autre souverain. Abandonnant la couronne de Pologne au profit de celle de la France en 1574, Henri III hérite d’un royaume aux finances catastrophiques et partiellement divisé par les guerres de religion opposant catholiques et protestants. Le défi à relever est énorme pour le jeune souverain qui doit également composer avec le parti des Malcontents dirigé par son frère, le Duc d’Alençon, et son beau-frère Henri IV. Bâti sur une solide documentation, l’ouvrage revient avec concision mais clarté sur tous les événements clés du règne d’Henri III, de son accession au trône à sa mort en passant par les guerres de religion successives, les complots fomentés contre la couronne, la fameuse « guerre des trois Henri » ou encore la tentative d’assassinat avortée de Jacques Clément. Si le récit ne se base cette fois sur aucune autre œuvre, Richard Guérineau reste malgré tout fidèle au ton de « Charly 9 » et donc de Jean Teulé. On retrouve ainsi le même humour, la même ironie mordante et surtout le même soin apporté aux détails, aux anecdotes cocasses qu’on ne trouve pas dans les livres d’Histoire. Saviez-vous, par exemple, qu’on avait oublié de faire jouer le Te Deum lors du sacre du roi (une première jugée de mauvaise augure !) ? Ou que les courtisans de l’époque étaient loin de partager le goût de leur souverain pour l’hygiène (« On ne m’enlèvera pas de l’idée qu’un bain par an c’est grandement suffisant ! ») ? Ou encore qu’Henri III avait été obligé d’interdire la braguette à la cour afin d’éviter que les courtisans puissent en sortir une arme qu’ils auraient dissimulé dans leur pantalon ?

L’ouvrage s’attarde également sur les nombreux problèmes de santé du roi (fistules anales et autres réjouissances), les nouvelles règles d’étiquette imposées à la cour, et bien sûr les relations intimes entretenues entre Henri III et les divers membres de son entourage. On aurait pu craindre à ce propos que le récit se montre trop caricatural et insiste lourdement sur l’homosexualité présumée du roi (c’est du moins ce que laissait sous-entendre le titre de l’ouvrage et l’illustration de couverture le représentant dans une position féminine, fardé et vêtu de rose). Or, si les premières pages ne parviennent pas à véritablement dissiper cette inquiétude, la suite se révèle heureusement plus nuancée à mesure qu’Henri III abandonne son maquillage et ses tenues outrancières. En ce qui concerne les Mignons (hommes de petite noblesse promus par le roi et avec lesquels il entretenait une profonde amitié), l’auteur a là aussi l’intelligence de ne pas tomber dans la surenchère ou le graveleux et insiste au contraire sur le fait que les rumeurs faisant état de relations homosexuelles entre le souverains et ses favoris tiennent bien plus de la calomnie que du fait avéré. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ses contemporains ne furent pas tendre avec lui ! Avec son goût pour la mode et les divertissements, son hygiène irréprochable et son profond dégoût pour tout ce que a trait à la violence, Henri III fait alors figure d’efféminé et de débauché, un portrait peu flatteur auquel il serait toutefois erroné de vouloir le réduire. Les graphismes sont pour leur part tout aussi réussis que le scénario : très colorés et surtout très variés (l’auteur s’amuse lors de certains passages à changer complètement de style de dessin ou à insérer des unes de journaux comiques faisant état de tel ou tel scandale secouant la cour).

Après une adaptation réussie du roman de Jean Teulé, Richard Guérineau se lance à nouveau dans la biographie royale mais cette fois sans filet. L’ouvrage reste cela dit très fidèle au ton du précédent tome et ravira tous les amateurs d’histoire par la qualité de sa documentation et la cocasserie de certaines de ses anecdotes. Une lecture drôle et instructive pour en apprendre un peu plus sur le règne du dernier des Valois.

Voir aussi : Charly 9

Antiquiste passionnée d’art, de cinéma, de voyage et surtout grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement).

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