Fiction historique

Festival Étonnants Voyageurs 2016 : Explorations et explorateurs

Etonnants voyageurs 2016

 

L’édition 2016 du Festival des Étonnants Voyageurs proposait comme chaque année quantité de conférences et tables rondes dans différents lieux de la vieille ville et alentours. Parmi toutes les rencontres qui ont émaillé ce long week-end de trois jours, il ne fallait surtout pas manquer celles qui se sont déroulées à l’École nationale supérieure maritime. Voici un petit aperçu de ce à quoi nous avons pu assister :

 

Géographies imaginaires : des abysses aux contrées rêvées

Sous la modération de Josiane Gueguen, deux auteurs nous ont fait découvrir leur dernière parution : « Atlas des contrées rêvées » pour l’ethnologue Dominique Lanni et « Abysses » pour le journaliste Christophe Migeon.

Dominique Lanni s’est penché sur des cartes et récits de voyage et nous propose de découvrir une trentaine de lieux légendaires (cités englouties, îles mystérieuses, territoires longtemps inexplorés…). Ce qui le passionne dans son travail c’est de constater le déplacement de ces sites mythiques au fur et à mesure que des explorateurs repoussent les frontières du monde connu. Par exemple, on a longtemps situé des royaumes merveilleux au cœur de l’Afrique avant d’en changer la localisation au moment où des Européens ont finalement été explorer ce territoire. Chaque fois que la réalité se révèle en dessous de nos attentes, on trouve une explication qui permet d’entretenir le mystère et de faire perdurer nos fantasmes. L’auteur prend l’exemple du royaume du prêtre Jean, un état chrétien attesté par plusieurs explorateurs au Moyen Age mais dont la localisation change au fil du temps (Marco Polo le situe en Asie, d’autres en Éthiopie…).

Atlas des contrées rêvées

Christophe Migeon s’est quant à lui intéressé aux profondeurs et nous propose une plongée dans les abysses. L’idée qu’ils devaient être totalement immuables que l’on doit à Aristote a longtemps persisté et ce n’est qu’au XVIIIe siècle que l’intérêt pour les profondeurs se réveille, essentiellement pour des raisons économiques (on estime par exemple que 40% des métaux précieux aujourd’hui se trouvent au fond de l’eau). La curiosité a donc fini par peu à peu prendre le pas sur l’angoisse, même si les abysses possèdent toujours une large part de sacré. Ce monde sous-marin s’étant construit en opposition au monde aérien, il reste pour les chrétiens le domaine du malin, peuplé de monstres tentateurs et terrifiants. Les monstres perdurent d’ailleurs sur les cartes jusqu’au XVIIe siècle, non seulement pour des raisons religieuses mais aussi marketings (ils titillent l’imagination du bourgeois et découragent la concurrence). Parmi eux, certains se révéleront bien réels comme le calamar géant, long de 18m dont 11m de tentacules.

Abysses

 

Des vies d’aventure

Cette table-ronde réunissait trois auteurs dont les derniers ouvrages sont consacrés à de grands aventuriers : Joshua Slocum, Jeremiah Reynolds et Vauban.

Alexandre Boussageon est l’auteur de « Porté disparu, l’étrange destin de Joshua Slocum », explorateur de la fin du XIXe et célèbre pour son tour du monde à la voile en solitaire. Il est alors âgé de plus de cinquante ans et a raconté son périple dans un livre. L’histoire du personnage est ponctuée de nombreux rebondissements : dès l’enfance il ne rêve que de naviguer ; à 25 ans il est déjà capitaine et commande les plus beaux vaisseaux ; puis la voile commence à reculer au profit de la vapeur et Slocum finit par incarner le marin du passé. Son tour du monde lui permet de redevenir quelqu’un au yeux du monde mais aussi aux siens propres. Anecdote amusante à propos de cet aventurier : il emmenait toujours avec lui son épouse et ses quatre enfants. Virginia, sa première femme, se retrouvera ainsi un jour à se battre armée de colts aux côtés de son mari lors d’une mutinerie.

L'étrange destin de Slocum

Christian Garcin a écrit sur Jeremiah Reynolds (Les vies multiples de Jeremiah Reynolds), navigateur considéré comme le premier homme à avoir posé le pied en Antarctique en 1829. Une théorie circulait à l’époque selon laquelle il y aurait aux deux pôles des entrées pour accéder à une autre surface sous la couche terrestre qui abriterait d’autres mers, d’autres terres. Si Reynolds n’a vraisemblablement jamais cru à cette théorie, il saisira l’opportunité pour faire financer une expédition en Antarctique, région alors connue des Européens mais encore inexplorée. L’explorateur a aussi été chef militaire, avocat et écrivain (on lui doit l’histoire d’une chasse au cachalot mythique qui fait beaucoup penser à Moby Dick sans qu’on puisse être certain que Melville se soit inspiré de son œuvre qui connue un succès très limité). Autre anecdote : le fait n’a pas été attesté mais des indices laissent à penser que le navigateur aurait entretenu une solide amitié avec Edgard Allan Poe.

Les vies multiples de Jeremiah Reynolds

Enfin Dominique Le Brun a consacré son dernier ouvrage à Vauban (« Vauban, l’inventeur de la France moderne »). Spécialiste de la poliorcétique (l’art de prendre des villes), l’homme est évidemment avant tout connu pour ses fortifications. On sait moins par exemple qu’il fit beaucoup pour lutter contre la pauvreté et qu’on lui doit l’invention de l’impôt sur le revenu. Contrairement à tous ceux qui gravitent autour de Louis XIV, Vauban n’est pas un courtisan : il ne mettra quasiment jamais les pieds à la cour et sera l’un des rares à manifester au roi son opposition à la révocation de l’Édit de Nantes.

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Antiquiste passionnée d’art, de cinéma, de voyage et surtout grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement).

Aucun commentaire

  • Sido

    Je crois que si j’allais un jour à ces rencontres, j’y laisserais mon (hypothétique) fortune !! Et en attendant, l’Atlas des contrées rêvées me tente bien…

    • Boudicca

      C’est le problème avec ce genre de conférence ^^ J’ai beaucoup hésité aussi, l’auteur en parle très bien et le livre est très attractif tant en ce qui concerne la forme que le fond.

  • lorhkan

    Comme il est difficile de tout suivre, je surveille la mise en ligne des conférences qui m’intéressent, c’est toujours une bonne manière de prolonger le festival… 😉
    Et je note celles présentées ici. 😉

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