Récit contemporain

L’Évangile de Jimmy

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Titre : L’Évangile de Jimmy
Auteur : Didier Van Cauwelaert
Éditeur : Le Livre de Poche
Date de publication : 2006 (déjà en 2004, chez Albin Michel)

Synopsis : Je m’appelle Jimmy, j’ai 32 ans et je répare les piscines dans le Connecticut. Trois envoyés de la Maison-Blanche viennent de m’annoncer que je suis le clone du Christ.

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Le doute, c’est le point de départ de l’intelligence !

C’était un sentiment étrange de lire ce livre, car aussi bizarre que cela puisse paraître, L’Évangile de Jimmy faisait partie des livres que je comptais lire depuis particulièrement longtemps. Et ce n’est pas une image, car il me semble que je comptais me l’acheter depuis que j’ai une quinzaine d’années, ni plus ni moins (dès sa sortie donc, en 2004) : quelques réflexions pertinentes d’une professeure d’anglais en classe de seconde, ça tient à peu, me direz-vous ! Et donc, après dix ans d’attente, j’ai finalement piqué l’exemplaire de mon cher beau-papa pour débuter ma découverte de ce qui semble être le violon d’Ingres de Didier van Cauwelaert : la fameuse question du clonage du Christ !


 

Partant de cette idée folle mais pas irréalisable pour autant, l’auteur prend un malin plaisir à dévoiler le véritable but de son roman : analyser notre société gangrenée par les religions, le scientisme, les politiques et autres entités globalisantes et abrutissantes. Pour cela, l’intrigue se lance vers une anticipation peu joyeuse de ces prochaines décennies où le mégaphone est aussi interdit que toute arme à feu et où le poids maximum toléré est régi par la loi. En-dehors de ces quelques désagréments, la religion, elle, se porte mieux que jamais, puisque les grandes religions actuelles se sont multipliées en des dizaines de sectes, toutes plus influentes les unes que les autres, à grand renfort de politiques et de show télévisés. Cette histoire de clone du Christ est d’ailleurs avant tout l’occasion de refaire l’histoire des trois religions du Livre en accéléré, d’autant plus qu’elles ont toujours été plus complémentaires que ce leurs représentants respectifs ne voudront bien jamais l’avouer.

Toutefois, plus qu’un pamphlet contre l’hypocrisie religieuse ambiante, l’ambiance de ce roman est en tout point prenante. Non seulement, par l’ironie et le cynisme, Didier Van Cauwelaert nous fait passer d’un humour franc et désintéressé à une tristesse inimaginable, mais en plus, au fur et à mesure de chapitres de plus en plus courts, on quitte la vision très subjective de Jimmy Wood pour celle beaucoup trop détachée de spectateurs de son calvaire : ce recul progressif, pris inconsciemment, m’a lentement fait réfléchir à la condition humaine en général et ce que nous pouvons garder des siècles passés (les réflexions sur l’héritage de Laurent Gaudé porteraient-elles leurs fruits ?). C’est pourquoi, je ne mets pas la note maximale en raison d’une histoire plus énorme que les autres ou en raison d’un style plus fabuleux qu’aucun autre. Non, je mets cette note maximale, car l’ensemble est à la fois complet et habilement dosé, entre des faits plausibles dans notre société sclérosée, un style percutant qui oscille d’un extrême à l’autre, et surtout une réflexion qui, je l’avoue, m’a bouleversée.

Un récit d’une tristesse maladive donc, dont la première partie et l’épilogue tiennent lieu de bouffées d’air frais nécessaires pour accepter notre si frêle réalité. C’est peu de dire que cette lecture est loin de m’avoir déçu entre horrible ironie et besoin de rire de thèmes aussi sérieux et complexes. La patte de Didier Van Cauwelaert donne vraiment envie de se pencher sur ses écrits…

Kaamelotien de souche et apprenti médiéviste, tentant de naviguer entre bandes dessinées, essais historiques, littératures de l’imaginaire et quelques incursions vers de la littérature plus contemporaine. Membre fondateur du Bibliocosme.

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