Fantasy

Les Annales de la Compagnie noire, tome 10 : L’eau dort, partie 1

Titre : L’eau dort, partie 1
Cycle/Série : Les annales de la Compagnie noire, tome 10
Auteur : Glen Cook
Éditeur : L’Atalante / J’ai lu
Date de publication : 2005 / 2010

Synopsis :  Réduite à une poignée d’hommes, la Compagnie se terre dans l’ombre… Les survivants du désastre se retrouvent à Taglios et entreprennent de libérer ceux d’entre eux qui sont encore coincés dans la plaine étincelante, maintenus dans un état de stase par Millevoix. Une terrible révélation les attend à leur arrivée : une conflagration magique d’envergure les laisse entrevoir la trame même du monde ainsi qu’une partie de l’histoire de la Compagnie. Les mercenaires ne sont pas au bout de leurs surprises !

Les livres doivent être tenus. Et la vérité consignée, même si le destin devait décidé que nul ne lirait jamais mes écrits. Les annales sont l’âme de la Compagnie noire. Elles nous rappellent ce que nous sommes. Que nous ne sommes que cela. Que nous devons persévérer dans ce sens. Et que la traîtrise, comme d’habitude, n’a pas réussi à nous saigner à blanc.

La Compagnie noire… ou ce qu’il en reste

Après une pause de plusieurs années, je me suis finalement replongée récemment dans les « Annales de la Compagnie noire », sans doute l’œuvre la plus marquante de l’auteur américain Glen Cook qui y met en scène une bande de mercenaires évoluant dans un univers de dark-fantasy. La série a été éditée et rééditée sous plusieurs formes en français, le découpage ou l’enchaînement des romans variant en fonction des versions (certains optent pour une publication selon l’ordre de parution, d’autres pour des regroupements géographiques entre les livres du Nord et du Sud…). Pour ma part je suis restée fidèle aux poches édités par J’ai lu (pour la simple et bonne raison que les romans végètent dans ma PAL depuis un petit moment maintenant), qui ont cependant l’inconvénient d’avoir scindé en deux certains des tomes d’origine. C’était le cas pour « Elle est les ténèbres », ça l’est également pour « L’eau dort », dont ce dixième volume n’est donc que la première partie. [Je précise qu’à ce stade de la série, des spoilers sont malheureusement inévitables (même si je vais m’efforcer d’en révéler le moins possible) aussi j’encourage vivement les lecteurs qui n’aurait pas encore atteint ce dixième opus à passer directement au paragraphe suivant]. On retrouve notre Compagnie noire bien mal en point après les événements qui se sont déroulés dans les plaines de la pierre scintillante, passage incontournable pour rejoindre le Khatovar, contrée d’origine des mercenaires et destination vers laquelle les conduisait depuis des années le capitaine. Toubib, Madame, Murgen et la plupart des figures emblématiques de la Compagnie sont désormais sur la touche, les vétérans se comptent sur les doigts de la main, et les nouvelles recrues ont déserté ou sont mortes depuis longtemps. Ce qu’il reste des mercenaires se terre dans la ville de Taglios que leur Némésis Volesprit tient toujours d’une main de fer, de même que la quasi-totalité de la région qui appartenait autrefois aux Maîtres d’Ombres. Mais la Compagnie noire n’a pas dit son dernier mot et peut encore compter sur des membres de choix. Parmi eux les sorciers (vieillissants !) Gobelin et Qu’un-Oeil, mais aussi la belle-famille de Mugen, son épouse et son ancienne apprentie, Roupille. Ensemble, ils vont tenter de lever le sort qui maintient les autres captifs, trouver un nouveau foyer digne de ce nom à ce qu’il reste de leur troupe, et infliger la raclée de leur vie à tous leurs adversaires qui pensent en avoir terminé avec eux.

Un nouvel annaliste prend la plume

Ce dixième tome amorce un sacré changement d’ambiance par rapport au précédent volume. D’abord parce que la plupart des figures qu’on avait l’habitude de voir sur le devant de la scène depuis le début sont aujourd’hui en incapacité de faire quoi que ce soit. Ensuite parce qu’on commence à sentir que l’auteur arrive au bout de son récit, et que l’histoire de la Compagnie touche bientôt à sa fin. Difficile de se départir de l’impression que « L’eau dort » est une sorte de parenthèse entre les deux gros morceaux que constituent « Elle est les ténèbres » et « Soldats de pierre » (le tout dernier tome de la série). L’intrigue principale y est ici comme suspendue, et il ne fait aucun doute dans l’esprit du lecteur que les protagonistes parviendront à venir à bout de tous les obstacles pour que l’histoire puisse rependre son cours. La sensation est un peu perturbante puisque, d’un côté, on prend toujours autant de plaisir à suivre les aventures de la Compagnie et à voir s’étoffer encore un peu plus l’univers dans lequel elle évolue, mais de l’autre on ne peut s’empêcher de voir ce dixième tome (et onzième, donc) comme une longue digression et d’attendre avec impatience que les choses sérieuses recommencent enfin. L’autre particularité de ce volume est qu’il est rédigé par un nouvel annaliste qui succède donc à Toubib, Madame et Murgen et qui n’est autre que Roupille. Qui dit changement de narrateur dit changement de style, et ses annales se distinguent en effet nettement de celles de son prédécesseur qui avait une forte tendance nombriliste. Roupille est pour sa part plus bavarde sur les activités et les humeurs des autres membres de la Compagnie avec lesquels on renoue avec plaisir, à commencer par les deux sorciers de la troupe qu’on avait un peu perdu de vue depuis plusieurs tomes. La nouvelle annaliste ne souffrant pas du même don que Murgen de voyager sur le plan astral, ses écrits font également davantage de place à l’action, si bien que le récit évolue selon un rythme plus dynamique que ce à quoi nous avait habitué l’auteur dans « Elle est les ténèbres ».

Les femmes à l’honneur

Contrairement aux précédents tomes qui faisaient la part belle aux combats, aux sièges et décrivaient par le menu les conditions d’une campagne militaire en milieu hostile, « L’eau dort » se concentre plutôt sur les manigances politiques. Plus question pour la Compagnie de lancer de grandes opérations de forces, en revanche pour ce qui est de mener une guerre souterraine pour saper l’autorité et les soutiens de la Protectrice, les mercenaires ont de la suite dans les idées ! Là encore cette diversification du récit est bienvenue et permet de visiter un certain nombre de lieux emblématiques de Taglios qu’on découvre avec curiosité, qu’il s’agisse du palais, de la bibliothèque ou de certains quartiers plus ou moins mal famés. Enfin, il convient de signaler l’aboutissement d’un phénomène amorcé depuis de nombreux tomes déjà et que la mise sur la touche d’une partie des « anciens » de la Compagnie n’a fait qu’accéléré, à savoir la mise en avant des femmes parmi les protagonistes les plus importants du récit. Que se soit parmi les mercenaires avec Sahra et Roupille, ou dans les rangs de leurs adversaires (la Radisha, Volesprit, la Fille de la nuit…), les principales figures les plus à même d’influer sur l’avenir de la région sont des femmes, ce qui est agréablement surprenant compte tenu du fait que, l’auteur mettant en scène une bande de mercenaires, on aurait pu s’attendre à ce qu’il se concentre sur un univers majoritairement masculin. Celles-ci n’ont de plus rien à voir avec les clichés qu’on rencontre malheureusement encore trop souvent en fantasy ou ailleurs (la (belle) guerrière bad-ass VS la (belle) demoiselle en détresse). Les héroïnes de Glen Cook, elles, sont à l’image de son univers : retorses et peu portées sur la délicatesse ou la sensiblerie.

Avec cette première partie du pénultième tome des « Annales de la Compagnie noire », Glen Cook marque une pause dans l’intrigue de la série qui ne progresse que très peu, quant bien même le récit, lui, se révèle assez dynamique. Le changement de narrateur est pour sa part bienvenu et permet de renouer avec certaines des figures emblématiques de la troupe, quand bien même une bonne partie d’entre eux sont ici aux abonnés absents.

Voir aussi : Tome 1 ; Tome 2 ; Tome 3 ; Tome 4 ; Tome 5 ; Tome 6 ; Tome 7 ; Tome 8 ; Tome 9 ; Tome 11 ; Tome 12 ; Tome 13

Autres critiques : Apophis (Le culte d’Apophis)

Antiquiste passionnée d’art, de cinéma, de voyage et surtout grande lectrice des littératures de l’imaginaire (fantasy essentiellement).

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